Parce qu'on finit toujours par se retrouver. {Serena Swank}

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Centre ville – Un peu plus de 15h.

La tête pleine de pensées, comme à son habitude, Jensen zonait dans les rues de Volusia, achetant par ci par là quatre bricoles pour remplir le frigo mais en rien pour meubler son appartement ou pour donner de la vie là où il en manque cruellement. Son appartement ressemblait à tous ses achats imposants de mobiliers ou de matériels que l'on tente de conserver à l'état neuf le plus longtemps possible sans franc succès. Sauf que chez lui, c'était une victoire sans égal. Un peu comme si tout était resté dans son emballage d'origine. Sans une seule marque d'usure. Comme il l'avait pris, il l'avait laissé. On pourrait voir sur cela un besoin de ne rien laisser le concernant, signe d'une tendance pathologique certaine, mais en réalité, il n'agissait de la sorte que comme toujours il l'avait fait. À toujours bouger tout le temps, on évite de s'attacher aux choses et par la même occasion aux gens. Mais l'idée de laisser trace de son passage ne lui plaisait pas pour autant. Il se savait de passage, alors à quoi bon en soigner la longévité ?
Mais peut-être devait-il essayer juste une fois. Trouver de l'intérêt dans autre chose que le vital, le besoin et l'essentiel. Le nécessaire n'est pas si mal. Pas fondamental, mais tout aussi bon à prendre. Joindre l'utile à l'agréable était encore quelque chose en quoi il avait bien du mal. Parce que s'étant toujours arrêté sur la conception purement formelle et classique de chaque chose, de chaque action, tout état, autre que le principal, lui apparaissait encore bien étranger. On lui avait toujours dit d'être correct, poli, clean, droit, lisse et tous autant de termes qui ne faisaient qu'appel à une norme dont il n'en connaissait pas le fondement mais qu'il avait appliqué à défaut d'autre chose. Jusqu'à ce que ce ne soit plus possible, plus soutenable. Pourquoi être obligé de faire des choses dont on n'en comprend nullement le sens? Alors on arrête. À quoi bon ?

Il fonctionnait comme ça Jensen. Cause – Effet. Pas plus … pas la peine. On produit une stimulation, on attend la réaction, réaction effectuée, on réitère. Mais jamais on agit pour agir dans l'attente subtile d'une réponse agréable ou désagréable. Jamais en aveugle. Et il était tellement désolé que ce ne soit pas compréhensible pour tous les gens qu'il avait côtoyé et qui avaient vainement tenté de le comprendre. Mais il préférait mourir incompris que passer sa vie à se justifier.
Après tout, qu'y gagnerait-il ? Un meilleur mode de vie ? Tel qu'il était, il lui convenait amplement. Il était à sa façon, comme il l'avait décidé. Il reflétait quelques erreurs du passé, quelques insurmontables, mais telle est la nature humaine. Et après ? Il n'est pas plus différent que cet homme qu'il vient de croiser, que cette femme qui marche sur le trottoir opposé au sien. Une personne lambda au milieu d'une masse d'insignifiants qui se démarqueraient pour certains, et s'oublieraient pour d'autres. Conséquence de choix pas toujours bons, mais pas toujours voulu. On apprend juste à faire avec. On ne peut se refuser à accepter la vérité uniquement parce qu'elle ne nous plait pas. Sinon, ce n'est pas la vie qu'il faut choisir. Elle n'est qu'une succession de « non » et de « rêve pas mec ». Et pourtant on s'opprime à tenter encore et encore dans l'espoir inespéré qu'un « non » devienne un « peut être ». Alors on s'accroche à cette idée là. Il arrive que sa réalisation se produise, en effet, reste à savoir si c'est pour le meilleur ou pour le pire. Il n'en enlève pas moins à l'option l'explicite, qui 2 coups sur 3 se solde par un « oui » catégorique. Par toujours accessible à tout le monde …

Sortant d'une supérette du coin dans laquelle Jen' avait coutume d'aller, il surprit une femme qui sur le trottoir face à lui, remontait la rue, d'un pas décidé sans trop d'empressement, légère et élancée. Serena … Comment pouvait-il ne pas la remarquer. Elle n'est pas le genre de femme que l'on oublie. Il est vrai que depuis qu'il avait trouvé ce taff à l'Outrageous, il la voyait bien moins fréquemment. Et leurs conversations sur la vie et toutes autres discussions révolutionnaires lui manquait quelque peu.

– Serena ??! Serena !!! S'exclama t-il alors, courant à sa rencontre.

Journée de repos que je ne comptais pas passer chez moi, j'avais tout fait le matin et du coup, trainer à la maison sans savoir quoi faire, ça me rendrait folle si je me forçais à vivre cela. Étant passé devant la salle de mon homme je lui avais fait un coucou rapide pour ne pas le déranger au milieu de ses cours, et je l'informais que je trainerais en ville et que si j'avais un problème je n'hésiterais pas à l'appeler ou à courir jusqu'à sa salle. J'étais confiante pour une fois depuis des semaines depuis mon agression, mais c'était comme tomber de cheval, il fallait que je remonte pour ne pas en avoir encore plus peur. Je refusais de me balader avec une arme, du coup j'avais chargé mon sac à main au maximum pour en foutre un coup au cas où, on chercherait à m'atteindre mais j'espérais que la malchance avait tourné pour moi. Quelques boutiques en vue, je poussais à chaque fois la porte et en ressortait quasiment avec un petit quelque chose, disons que je ne roulais pas sur l'or mais que je tenais à ne pas me restreindre non plus. Je mettais un peu de côté tout comme le faisait Zac pour notre mariage, bien que je ne voulais rien de bien grand, un petit comité me ferait bien plus plaisir que des personnes en plus, qui engendraient des dépenses inutiles.

Je marchais d'un pas rapide sans m'en rendre compte, limite comme si j'étais traqué par quelqu'un, mais je ne m'en rendais pas du tout compte, j'étais plutôt dans mes pensées à me demander ce que je pourrais bien me prendre à la prochaine boutique. Je n'étais pas superficiel, j'aimais juste avoir de quoi me changer et à la fois me plaire mais surtout plaire à mon homme, mais je restais très simple et je n'en faisais pas une tonne.

Mes talons claquaient sur le sol et mes cheveux cachaient en partit mon visage, d'ailleurs je regrettais de ne pas les avoir attacher parce que je faisais que les remettre en arrière sans arrêt, mais je prenais mon mal en patience sur ça. J'avais d'autres préoccupations en tête, quand je ne faisais rien de particuliers alors ma tête s'emplissait de tout et rien et du coup je ne faisais plus trop attention autour de moi. Entendant au loin mon prénom je ne réagis pas tout de suite du coup, mais que quelques secondes plus tard, où mon appelant se trouvait quasiment tout à côté, et d'un sourire aux lèvres je reconnais bel et bien qui c'était.

« Que vois-je devant moi ... est-ce une hallucination ... »

Faisant mine de ne pas le reconnaitre, en fin de compte je lui faisais comprendre que ça faisait quelques temps qu'on ne se voyait plus du tout, j'avais eu vent qu'il travaillait chez Chad Ferguson, et depuis je ne le croisais plus. Lui tapant sur l'épaule, je lui fis un sourire avant de le serrer contre moi un instant et de me reculer avec un certain sourire, ravie de le croiser par hasard et surtout que lui m'ait aperçu, parce que je lui aurais passé devant sans m'en rendre compte sinon.

« J'ai bien cru que tu m'évitais ... mais voyant que tu as couru jusqu'à moi il va falloir que tu trouves une excuse à ta disparation ces derniers temps ...»

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Sa relation avec Serena avait toujours été particulière, mais jamais elle n'avait connu de brusqueries ou de bouleversements comme elle en vivait pour le moment. Parce que Jensen avait toujours cru qu'il pourrait allier travail et vie personnelle sans que l'un n'interfère sur l'autre, et que ce n'était pas ici à Volusia qu'un tel facteur changerait. Parce qu'il aimait la clarté et la vraisemblance, l'authenticité dans tout genre de relation que ce soit amical, professionnel ou amoureux. Mais il semblerait que la vie en ai décidé autrement pour ce coup là avec Serena. Volusia n'était pas une ville facile. Cette guerre de gangs n'était en rien une idée pour entretenir il ne sait quel mythe sur la cité mais bien une réalité. La gangrène qui dévorait ses habitants autant que ses rues et ses bâtiments. Qui déchirait des familles et des amis. Rongé par la maladie, cette puante jalousie qui régnait en maitre et qui était loin d'être au goût du jeune homme. Mais toujours étant qu'il avait eu bon espoir d'en changer la donne le concernant.
Néanmoins, sa rationalité aussi belle soit-elle, n'avait, en ce lieu, aucun effet. Force avait été le fait qu'il ai connu Serena dans une autre ville, dans une toute autre situation, dans un tout autre contexte à et l'abri des déchirements. Dans une ville où la facilité et l'accessibilité touchaient ses habitants avec agréabilité et tranquillité. Tout le contraire de ce qu'ils vivaient à Volusia. Mais il ne baissait nullement les bras. Ce qu'ils avaient construit ensemble, il y tenait bien trop pour qu'on lui en ôte le contrôle sans qu'il ne montre d'opposition. Il ne laisserait pas cette guerre m'immiscer entre eux comme elle l'avait déjà fait. Ils s'étaient retrouvés, ce n'était pas pour se perdre à nouveau.
Il avait néanmoins conscience que le fait qu'elle soit éperdument amoureuse de Zac qui fait parti du clan des Attwood et lui qui bossait à L'Outrageous pour Chad Ferguson, le pire ennemi d'un point de vue orienté et réducteur, ne le mettait pas en très bonne posture. Mais il la savait capable de faire la part des choses. Elle le connaissait bien, il la savait comme lui, et le poids de cette guerre devait la peser bien plus que lui. Alors qu'il essayait de s'en détacher le plus possible, elle, n'en était que plus éprise, ne pouvant s'en défaire. Ce n'était par autant qu'il voulait que leur amitié en pâtisse. Des sacrifices il en avait déjà trop fait, il ne voulait pas qu'elle soit le suivant. Il ne voulait pas renoncer. Il n'en pouvait plus de perdre les personnes auxquelles il s'attachait.

Arrivant à sa hauteur, il perçut son sourire, en accord à ses paroles feignant l'inconnaissance. Il haussa les sourcils, baissant le regard ayant saisit ce qu'elle cherchait à lui faire comprendre. Lui rendant son sourire alors qu'elle posait une main sur son épaule, ils s'étreignirent un court instant avant de se reculer un peu pour communiquer. Il secoua la tête sans perdre son sourire avant de lui répondre, bien conscient qu'il lui doit des explications sans vouloir lui mentir ou se défiler.

– Pourquoi je voudrais t'éviter ? Non, je te demande pardon Serena, j'ai été pas mal occupé ses derniers temps. Depuis que je bosse à l'Outrageous, j'enchaine les heures de boulot. J'aurais du te le dire plus tôt, mais tu sais, c'est juste un boulot. (Ne voulant pas que cette énonciation mette un froid entre eux, il ne laissa pas au silence le temps de prendre trop d'ampleur.) Et sinon, comment vas-tu ? Tu t'ai fait discrète toi aussi. Comment se porte Zac ?

Il ne pouvait s'empêcher d'être inquiet pour elle au vu de son implication, mais elle avait décidé de vivre avant tout, il ne pouvait que l'encourager dans ce sens. Il gardait ses craintes pour lui, ne voulant l'envahir avec tout ça, sachant pertinemment qu'il ne lui apprendrait rien, les risques, elle les connaissait déjà.

Un moment que je tournais dans le quartier pour trouver le magasin dans lequel je craquerais encore une fois, celui de lingerie avait été d'une bonne occasion car moi qui adorait ça, j'avais pu avoir ce que je voulais à des prix corrects. Je comptais changer de rue et je n'imaginais pas qu'on m'avait repéré de loin, pas de crainte car ça n'était que de bonne augure qu'il soit derrière moi, car sinon je ne l'aurais pas vu. Il me manquait car ça faisait des journées entières qu'il n'apparaissait plus dans ma vie et malgré tout ça me laissait une place vide. Très particulier ce lien qui m'unit à lui, pas très banal et encore moins du déjà vue avec une autre personne, c'était à la fois fort et proche, et je lui faisais une confiance saine et sans inquiétude. Mais il y avait une chose contre lequel, je n'étais pas très ravie, c'était que je n'avais pas eu de nouvelles de sa part, et ça c'était une chose que je pensais pas possible de lui. Le sourire aux lèvres de le voir, j'oubliais pas qu'il avait fauté à notre amitié et je m'étais pas gênée pour le lui faire comprendre, gentiment car je n'étais pas vraiment du côté de Satan, mais plutôt de l'ange.

« Outrageous ... du côté obscur de la force ... hum je pensais que tu bosserais au centre comme je le fais ... ça m'étonne de toi, bien que ça ne change rien entre nous, tu sais bien que toute cette guerre ... c'est pas ma priorité ... »

Haussant les épaules, bon d'accord il bossait pour Chad Ferguson, un homme je ne pouvais pas me voir, tellement il empêchait sa femme de s'épanouir librement, je ne le connaissais pas plus que ça, car les Ferguson et leurs querelles ne m'intéressait absolument pas. Je ne baignais pas dans tout ça, dans cette guerre qui pourtant me nuisait, nuisait à un total bonheur dans ma vie, mais je savais que ça ne changerait jamais ici. L'observant de haut en bas, il était toujours le même, toujours aussi séduisant et je me demandais s'il s'était peut-être trouvé quelqu'un, vu que les dernières nouvelles que j'avais, n'étaient plus à l'ordre du jour.

« Que fais-tu seul ici ... où est donc la fille qui a pu te faire craquer ... *faisant mine de cherchant derrière lui* ... je plaisante mais ça me fait du bien de me lâcher un peu ... depuis mon agression je tente de faire face en pensant qu'à du positif ... »

Un gros travail sur ma personne, Zac m'avait beaucoup aidé car on avait tous les deux fait un travail psychologique sans l'aide de personne, j'avais pu apprivoiser mes peurs bien qu'il me manquait à ce qu'il m'inculque des techniques de défense au niveau que j'ai, en gros assez faible. Le prenant par le bras je comptais bien l'avoir pour quelques heures maintenant qu'il était devant moi, enfin je ne savais pas même ce qu'il avait prévu de sa journée, mais je tenais à ce qu'on la termine un peu ensemble. Posant ma tête contre son bras je finis par lui dire :

« Où m'emmènes-tu maintenant Letham ... t'as pas le choix tu dois faire avec mon ombre quelques heures ... je te parlerais un peu de tout ce que tu as manqué ... et tu as intérêt à me raconter comment tu en es venu à bosser dans le quartier Ouest ... »

Je n'aimais pas trainer en pleine rue, un mauvais réflexe sans doute ou alors un bon si un jour le mal se produirait en pleine rue, disons que j'avais toujours peur qu'une voiture débarque de je ne sais où pour venir nous tirer dessus avec des homme à l'intérieur. D'ailleurs j'étais étonné que les Ferguson ne lui ait pas posé de questions sur son entourage, sur le fait qu'il soit proche des Attwood et qu'il bosse quand même dans le bar de Chad. Je le connaissais cet endroit, j'y avais déjà mit les pieds avant que je ne sorte avec Zac, y'a quelques années déjà, incognito de tout ce monde j'avais pu m'amuser et autant dire que j'avais eu le coeur battant fort toute la soirée, de peur qu'on me grille.

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Il y avait bien des choses qu'il était capable de partager avec elle, bien des choses qu'il pouvait lui dire ou lui faire comprendre sans toujours avoir besoin de mettre des mots sur des regards, des mots sur des gestes et autres attitudes qui s'en passaient sans mal. Parce qu'il n'avait jamais été fort pour ce qui était d'exprimer ses émotions. Les sentiments le mettant si mal à l'aise par instants. Ce besoin irrépressible d'avoir à se prouver sans cesse les choses. Comme si les signaux ne suffisaient plus. Des paroles, toujours des paroles. Si vides de sens … Pour au final finir par ternir cet échange si particulier entre deux êtres comme eux. Non … pour son plus grand bonheur, avec Serena c'était bien différent. Bien qu'il les savait nécessaires, les mots, ce n'était pas tous ce qu'ils avaient. Loin d'être tout ce qui leur restait à défaut de gestes imprécis. Et pourtant, le malaise s'était cependant installé entre eux, et à la suite de cela, la distance. Peut être l'avait-il cherché ? Peut être pas … Tout ce qu'il pouvait dire pour justifier son comportement si vil était que le repli avait toujours été solution aisée pour lui. Et encore, il voyait en elle une confortable et idéale issue. Mais loin, très loin d'être la meilleure et encore plus entre eux. Ce besoin continuel d'isolement qui le rongeait au plus profond de son être comme s'il avait l'intime conviction d'y trouver la paix …
Et pourtant, il n'avait jamais autant été apaisé qu'en sa présence. Peut être parce que jamais il n'y avait eu entre eux ses mots au goût de passé amer et douloureux mais au parfum délicat et interdit.

Il lui lança un regard averti quant à ses propos, comprenant son point de vue bien qu'elle n'était pas non plus pour tout ce qui se jouait à Volusia mais qu'on ne pouvait ignorer. Serena le jaugea ensuite de la tête au pied et il esquissa un sourire avant de saisir ses propos. Il se frotta l'arrière du crâne avant de lui formuler ses mots.

– Je crois bien que ne le l'ai pas encore trouvé … Il prit soudainement une expression grave quand elle poursuivit énonçant un fait loin d'être anodin, qui lui fit comprendre ô combien il avait bien trop fait l'absent. Ton agression ? Pardonnes-moi Serena, j'aurais du être au courant … Je suis tellement désolé de ne pas avoir été là quand tu aurais pu avoir besoin de moi … J'ai tout fait foirer.

Il se reprochait tellement son attitude introverti et solitaire à tel point de ne plus voir personne autour de lui. De l'avoir occulté durant un temps certain sous prétexte qu'elle avait trouvé la stabilité que lui recherchait encore. Il maudissait son égoïsme autant que le fait de ne pas être en mesure de faire face aussi fièrement et dignement qu'il l'aurait souhaité. Mais il était ravi d'apprendre qu'elle relevait la tête malgré tout. C'était tout à son honneur bien qu'il consentait qu'en avait du en baver avant d'en arriver là. La jeune femme le saisit alors par le bras, bien décidée à se changer les idées et il n'était pas contre une telle proposition. Il en avait autant besoin qu'elle.

– Hm ça dépend … Mais je suis pas contre l'idée de faire avec ton ombre pendant quelques heures. Je me soumets ! Je te dirais tout ce que tu as envie de savoir si tu contribue à me rafraichir la mémoire sur ses dernières semaines. Lui dit-il dans un clin d'œil avant de reprendre tout aussi souriant. Ça te dis d'aller boire un café quelque part ? Profite s'en, c'est moi qui t'invite! Ajouta t-il marquant le pas en direction de la terrasse la plus proche.

Sa présence avait un effet total sur sa personne. Il ne pouvait l'expliquer. C'était comme si elle avait simplement besoin de lui sourire pour que sa journée en soit illuminée. Calmant sa douleur, pansant sa blessure pour un temps, suffisant à leur rencontre. Rendant à sa vie cet éclat qui s'en était allé et qui renaissait à chaque fois de ses cendres qu'il gardait précieusement. Parce qu'il n'avait besoin de rien d'autre …

Je ne savais pas être une méchante jeune femme, j'avais un bon fond et du coup je ne pouvais pas lui en vouloir complètement, mais il avait quand même manqué, à une partie de ces derniers mois. Une partie importante car j'aurais pu en perdre la vie, et pas même alors il aurait su que j'étais morte, en secouant la tête, j'en avais alors un goût amer dans la bouche, car il aurait pu m'aider à remonter la pente. Je n'étais pas tombé bien bas car mon homme m'en aurait empêché, cette descente en enfer mais malgré tout j'avais souffert durant des nuits, de cauchemars et autres moments de blues. Surtout que la dernière fois que j'avais vu Jensen, on avait trinqué plusieurs fois, à la demande en mariage de Zac, d'ailleurs on avait largement trop bu, mais qu'est ce qu'on avait rit ce soir là. Mais ensuite, il y avait eu un vide total, et puis mon agression. Dur moment que je n'aimais pas ressasser avec les étrangers, mais il se devait de savoir, ce qu'il avait manqué, ce pourquoi il ne devait plus jamais me refaire, un manque pareil.

« Ou alors tu n'as pas encore vu, qu'elle te fait de l'oeil en douce ... »

Lui trouvait une âme parfaite, c'était parfois ce qui m'amusait, car je n'aimais pas le sentir seul, sans personne pour l'embêter le matin, ou bien quelqu'un sur lequel il pourrait s'appuyer en dehors de moi, une charmante jeune femme, qu'il pourrait aimer. Je le savais très solitaire, et renfermé sur sa personne, et du coup ça m'étonnait pas qu'il n'ait personne, ce que je trouvais dommage car il ferait un si parfait petit-ami, pour une heureuse élue. Mais je ne le tracassais pas trop avec ça, juste une petite remarque à chaque fois que je le croisais, à chaque fois qu'on passait un instant ensemble, et ensuite ça s'arrêtait là. D'ailleurs je ne lui racontais pas en détails ma vie auprès de Zac, car je ne voulais pas qu'il ait de la peine, à ne pas avoir tout ça, je lui parlais des choses importantes comme le mariage, et je devais lui dire aussi pour le bébé.

« Je t'en ai voulu de ne pas avoir été auprès de moi, Zac voulait te trouver pour te faire bouger mais je n'ai jamais accepter, car j'aurais aimé que ça vienne de toi ... tu ne l'as pas su, peut-être mais ... si tu aurais prit de mes nouvelles, comme tu le faisais si bien avant tu l'aurais su, mais ... c'est passé, je te raconterais ça tout à l'heure mais ensuite, on oublie ça, d'accord ? »

Tout ça d'un ton calme et sans aucune haine à son encontre, peut-être qu'il sentait qu'au fond j'étais déçue mais ça, qui ne le saurait pas, car bien sûr que j'aurais aimé qu'il soit près de moi, mais apparemment il avait tant à faire à ce moment là. Travailler pour Chad, j'espérais qu'il ne se fasse pas influencer par cet homme, il m'inspirait aucune confiance celui-ci, alors de savoir Jensen si proche, dans le travail, j'avais peur pour lui. J'en disais rien pour le moment, j'espérais qu'il me raconte un peu comment ça se passe, s'il s'y sent pas trop en danger, et puis comment ce Chad gère les affaires de son Outrageous.

« Va pour un chocolat chaud pour ma part, j'ai envie d'un peu de douceur, dans ce monde de brute ... »

Il était là, tout collé contre moi et j'avais mon coeur qui battait la chamade comme toujours, on s'entendait si bien avant, que ça ne pouvait pas changer comme ça, et puis tourner la page sur une personne si importante pour moi, ça me paraissait impossible. Le quittant pas, je le suivais jusqu'au café qu'il voulait, un peu de pause ne me ferait pas de mal, mes chaussures me faisaient un mal de fou, alors je profiterais sans doute, de les ôter un peu, discrètement aussi.

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Solitaire dans l'âme, il avait parfois tant l'impression qu'il ne pourrait changer, s'adapter à autre chose. C'était en son sein qu'il s'était façonné, c'était à ce recours là que sa personnalité avait eu à faire pour survivre. Au vu des épreuves qu'il avait traversé, c'était de cette manière qu'il était parvenu à faire avec ses angoisses et autres idées obsédantes. Mais ce vertige de vivre à chaque fois qu'il se sentait dans l'impasse n'était pas prêt de le lâcher. Parfois, il donnerait tout pour être quelqu'un d'autre à la vie plus facile, à la personnalité plus stable … Un autre que les sentiments ne dérangerait pas, qu'il les rechercherait par dessus tout, qui rêverait d'invincibilité. Mais il n'était pas ce mec là. Et il le savait. Cette incompréhension qui le gagnait à chaque fois qu'il essayait de voir clair, qui lui donnait tant l'impression d'être inadapté à cette vie à laquelle il se raccrochait sans raison. Il ne comprenait plus ses choix, il n'agissait que par réflexes dans chaque action qu'il faisait, ne pouvant faire dans l'innovation. Effrayé par le changement qu'il trouvait dramatique. Ce manque de contrôle, cette perte de sens … Non, il ne pouvait le cautionner. Et pourtant, quand il posait les yeux sur Serena, il remarquait avec d'admiration ô combien le changement la rendait heureuse. Il ne disait pas qu'il ne lui arrivait pas d'avoir des problèmes, mais elle avait cette force qui lui était inconnu. Les mécanismes de défenses dont faisait preuve Jensen, étaient si archaïques et dépassés. Ce besoin d'isolement puissant dès que plus rien n'allait… et auquel il avait tant recours mais qui pouvait blesser les seules personnes en qui il tenait. Qui l'avait blessé elle. Mais il n'avait pas d'explication. Il se savait responsable. Il était tiraillé par ce besoin de foutre le camp qui le saisissait si violemment mais auquel il tentait de faire face au mieux, épris dans cette boucle infernale … Parce qu'on ne pouvait pas dire qu'il vivait, ce mot lui était désormais étranger.
Serena lui lança une réplique qui le fit sourire et en même temps sonnait si véridique.

– Me crois-tu aveugle ?!

Lui dit-il en riant.

Sans aucun doute. Un peu qu'il l'était, mais se l'avouer, c'était une autre histoire. Il ne disait pas qu'il ne lui arrivait pas d'avoir de la compagnie en soirée. Cependant, c'était dans la longévité qu'il merdait. Parce qu'il se retrouvait pris entre deux feux, il se retrouvait soudainement sur-investi, sur-engagé, alors il prenait la tangente. Et toujours ce même reproche de le penser inatteignable : « Avec toi c'est comme si on était seul ». Être avec quelqu'un sans l'être …
Il n'empêchait personne de le quitter, il ne reprochait à personne d'abandonner la relation qu'il vivait avec lui mais qu'il faisait seul. Il ne les retenait pas par autant. Il savait qu'il était le problème. Alors oui, on s'en trouve blessé … On souffre intérieurement, mais jamais rien n'est exprimé. On reste là, impassible. Mais malgré ses problèmes intérieurs, il appréciait énormément être avec elle et avec Zac. Il savait se réjouir du bonheur des autres et en particulier de celui de Serena. Il était plus que ravi de savoir qu'ils étaient fiancés. Il avait besoin de savoir que son monde n'était pas totalement en décomposition.

– Je comprends Serena, je suis vraiment navré pour mon attitude … J'ai pas d'excuses à te donner…

Elle lui synthétisa alors la situation, proposition qu'il accepta.

Si tu veux …

Alors qu'ils marchaient en direction d'un café, elle lui signala son envie immédiate qu'elle releva avec originalité, comme il pouvait le constater souvent chez elle. Unique était sa Serena. Il retrouvait peu à peu leur unicité qu'il avait néanmoins mis à mal par son absence. Chose qu'il n'avait pas voulu lui faire subir …

– Tes désirs sont des ordres !

Lui dit-il dans un clin d'œil. Arrivant à proximité d'une terrasse, il lui fit un geste du bras pour lui faire part de ses intentions. Ils prirent alors place à une table au soleil. Une fois installés, un serveur vint à eux leur demandant leur choix.

–Ça sera un chocolat chaud pour la demoiselle, et un café bien serré pour moi s'il vous plait.

Il prit note puis disparu, les laissant seuls. Reposant son regard sur elle, il ne pouvait empêcher ce sourire de gagner ses lèvres à chaque fois qu'il se trouvait en sa compagnie. Appuyant les coudes sur la table, il vint lui caresser amicalement l'avant bras avant de lui demander formulation.

Je t'écoutes ma belle …

Une fois à l'intérieur, la jeune femme en laissait alors tomber sa veste sur la chaise, et se repoussait ses cheveux en arrière, au moins il n'y avait pas trop de monde, et c'était sans doute mieux comme ça. Elle aimait quand il y avait de la musique, comme ici, car au moins ça empêchait les oreilles baladeuses, à notamment venir écouter ce qu'ils pouvaient dire, ce qu'elle n'aimait pas ça. Mais parfois les choses sont faites, pour que même en faisant attention, les murs arrivent quand même à avoir les oreilles bien tendues. Elle n'avait rien à cacher mais elle avait une certaine pudeur, et elle ne parlait pas beaucoup d'elle, à des personnes qu'elle ne connaissait à peine ou pas vraiment. Prenant son air détendu, elle ne l'était pas tout à fait intérieurement, mais cela faisait déjà quelques temps, qu'elle n'était plus du tout sereine, et sans doute que son agression en était fortement pour quelque chose.

« Tu promets de plus faire ça, Letham ? »

Elle sentait la main virile de son ami, venir se poser contre sa peau, comme pour qu'elle ne s'intéresse qu'à lui, et qu'elle ne commence pas à jouer sa petite curieuse, en ayant les yeux tournés un peu partout autour d'elle. Elle espérait que s'il répondait un "oui" alors qu'il s'y tiendrait, car elle n'aimait pas, être blessé par quelqu'un de proche et là même s'il en avait été le cas, elle pouvait pas lui en vouloir trop longtemps. Déjà même si c'était un peu le hasard qui venait de faire les choses, c'était peut-être un petit plus, pour qu'ils renouent quelque chose, et pas que leur vie quotidienne, finisse par avoir raison d'eux.

« Disons que ... c'est pas facile à raconter mais, je vais tenter de le faire pour toi ... je t'épargnerais certains détails, qui sont pas si important que ça ... »

En même temps qu'elle le préparait à l'écouter, elle se préparait intérieurement à prendre sur elle, car c'était encore difficile pour elle, que d'y repenser mais aussi d'en reparler, car elle avait dû tant de fois, redire les événements à la police, et à d'autres personnes influentes, comme Riley. Se mordant la lèvre inférieure, elle se mit instinctivement à serrer la main du jeune Letham, avant de finir par se lancer, sans réfléchir plus.

« C'était en fin de journée, je rentrais chez moi après avoir passé quelques heures chez des amis ... sur la route il faisait plutôt noir et une voiture en plein phare à commencer à vouloir jouer avec moi ... j'ai terminé ma course dans un ravin et j'avais compris, que si je partais pas rapidement ... je serais de la chair de viande pour ces deux ... chiens en chaleur »

Beaucoup de haine dans son regard mais beaucoup de peine aussi, mais elle ne paraissait pas agressive et elle racontait ça, doucement, et d'un ton tout à fait calme, mais elle voulait arriver jusqu'au bout de l'histoire. Le serveur vint la couper en déposant un café et puis un chocolat chaud sur leur table, avant de repartir, elle prit la tasse chaude entre ses mains, et poursuivit son histoire. « J'ai tenté de fuir dans la nuit ... j'ignorais que Zac inquiet de ne pas me voir rentrer, avait prit le chemin du retour pour tenter de me croiser ... mais les deux hommes ont finit par m'attraper, l'un d'eux voulait en découdre en me ... enfin tu vois et puis Zac a débarqué après que je me sois débattu contre les deux hommes, et que l'un d'eux m'ait tiré dessus ... mais la suite je ne m'en souviens pas, car j'étais inconsciente ... je crois que Zac les a ... lui et moi ont a plus trop reparlé de cette histoire ... »

Laissant un sucre dans sa tasse, elle le regardait fondre un instant avant de finir par remuer l'ensemble, un instant de pause, pour peut-être lui préciser la suite, bien que l'agression s'arrêtait là, mais il y avait autre chose qu'il se devait de savoir :

« Une semaine d'hôpital, et une semaine de souffrances ... heureusement que Zac était là, car je ne sais pas trop ... ce qu'il en serait devenu de ma personne ... et puis à si près du bonheur ... ça aurait été si injuste »