Le matin se levait à peine mais, déjà le soleil faisait tout pour que les habitants de cette ville se lèvent. Helena dormait tranquillement, sa longue chevelure blonde étalé sur l'oreiller, elle dormait si bien, les traits reposés, comme si elle était apaisée. Elle avait tout l'air d'un ange, elle souriait à moitié, certainement qu'elle faisait un rêve des plus agréables. Mais un rayon de soleil taquin se posa sur son visage. Les yeux fermés, elle put sentir cette présence désagréable en cette douce matinée. Elle ouvrit doucement les yeux, mais se tourna vivement sur le côté, ne voulant pas être éblouit dès le matin par ce rayon de soleil. Elle voulait encore dormir, profité du calme ne serait-ce que quelques minutes, cela lui serait suffisant. Mais rien à faire. Elle avait bon se tourné et se retourné dans son lit, rien n'y faisait, elle ne dormirait plus. En soupirant, elle rejeta les couvertures au pied du lit et se leva vivement. Elle s'étira un petit peu avant d'ouvrir légèrement la fenêtre.

La jeune femme se rendit ensuite dans la salle de bain. Elle ouvrit le robinet d'eau chaude de la douche avant d'ôter ses vêtements et entré dans la cabine. Elle ferma les yeux, laissant l'eau chaude détendre ses muscles, la réchauffant un petit peu, par cette matinée assez froide. Après quelques minutes, elle se lava et sortit ensuite de la cabine. Se dirigeant vers le miroir, elle effaça la buée qui était dessus. Elle pouvait voir deux cicatrices. Impact des balles qu'elle a reçue il y a quelques années. Une à l'épaule, l'autre, un peu au dessus de sa poitrine côté droit. Par chance, aucun organe n'a été touché. Elle a eu énormément de chance, elle en a conscience, plus que n'importe qui. Lena se sécha, elle n'a plus de temps à perdre, elle a des choses à faire aujourd'hui. Elle enfila des sous vêtements, un jean slim noir ainsi qu'une paire d'escarpins rouge. Un haut de la même couleur, et une petite veste noir par dessus. Elle aimait joué sur les couleurs, mais elle veut toujours que ce soit harmonieux. Elle se maquilla légèrement, mettant surtout en valeur ses yeux, l'une des choses qu'elle préfère chez elle. Après avoir lissé ses cheveux, elle était enfin prête.

Elle descendit à la cuisine où elle prit son petit déjeuner en compagnie de son frère. Même si ils vivent dans la même villa, ils ont des emplois du temps bien différent, il n'est pas toujours évident de se voir. Ainsi, les matins, ils font en sorte d'être ensemble. Ils discutent, rient, passent un moment avant de partir pour toute une journée. Dans son cas, elle partit en direction de l'université. Non pas pour ses études puisqu'elles sont terminées, mais pour donner des cours de soutien. Du moins, c'est la raison qu'elle donne à tout le monde. Mais c'est aussi un moyen pour elle d'avoir un œil sur tous les étudiants. Elle a toujours eu ce petit côté maternel qui fait qu'elle veut prendre soin de tout le monde, au dépit de sa propre sécurité à elle. Mais elle ne changera pas pour autant, elle est comme ça, voilà tout.

La journée se passa sans encombre. Par chance, il n'y a eu aucune bagarre, rien du tout. Cela est rassurant. Dans cette ville, personne n'est à l'abri, pas même les étudiants ou les enfants. Et ce serait vraiment pire si il arrivait quelque chose à un enfant, comme à la fille de son meilleur ami. A cette pensée, son cœur se serra, mais elle ne montre rien, comme à son habitude. Elle a apprit à vivre avec la souffrance sans jamais le dire. A tort ou à raison. Elle ne sait pas si c'est la meilleure chose à faire, mais elle estime que cela vaut mieux. Dans sa situation, elle n'a pas le droit de paraître faible, ce serait bien trop dangereux. En rentrant chez elle, elle ne savait pas quoi faire. La soirée semblait être calme, à l'image de la journée qui venait de passer. Ainsi, elle prit la décision de se rendre à l'Outrageous, la boite dirigée par Chad, son cousin. C'est un lieu où, forcément, tout le monde sait qui sont les Ferguson, et par conséquent, elle ne passe pas inaperçue. Mais elle s'en fiche, elle aime bien cet endroit, surtout lorsqu'il s'agit de vivre une bonne soirée.

Elle ne prit pas la peine de se changé, elle n'est pas sale ou quelque chose comme ça. Elle est même très présentable. Et de toute façon, personne ne lui refuserait d'y entré, ce serait suicidaire. Après s'être garée sur le parking, Lena sort de sa voiture et avance vers l'entrée. Pas la peine de faire la queue comme tout le monde, elle entre sans problème. Elle parvient à se rendre au bar sans aucun problème, et prend place sur un tabouret, s'attendant à ce que le serveur s'avance directement vers elle, comme le ferait tous les autres. Néanmoins, ce ne fut pas le cas. Elle eut un soupir d'exaspération. Non pas qu'elle pense être le centre du monde, mais elle n'aime pas attendre, elle a horreur de ça. Mais elle ne fit aucune remarque, elle attendra. Elle prête à peine attention aux personnes qui la regardent intensément tout en dévisageant en même temps le serveur. Eux, ils savent qui elle est, ça ne fait aucun doute. Elle croise ses mains, ses avant bras posés sur le bar, un petit sourire narquois aux coins des lèvres.

Elle n'ignore pas qu'il y a toujours énormément de monde dans cette boite. C'est même tout le contraire, elle le sait très bien. Surtout que c'est la seule boite de nuit de ce quartier. Mais elle le sait surtout car c'est une habituée des lieux, étant donné qu'elle appartient à Chad, son cousin. Elle vient souvent ici, l'ambiance est toujours excellente, rares sont les fois où il y a des disputes, et même si cela arrive, tout se règle rapidement. C'est l'endroit parfait pour se détendre, mais aussi passer une excellente soirée. Helena a ses habitudes ici, elle connait la plupart des serveurs, les habitués aussi, puisque certains sont les étudiants qu'elle voit tous les jours à l'université. Elle n'est pas inconnue en ce lieu, tout le monde peut mettre un prénom sur son visage, enfin, surtout un nom. Les Ferguson ne passent jamais inaperçu, cela ne fait aucun doute. Mais il y a toujours une exception.

Cette exception fut le barman de la boite qui ne reconnu pas la jeune femme, alors que tous les autres clients qui étaient au bar avaient les yeux rivés sur elle. Une chose qui ne dérange pas Lena outre mesure, du moment que ce n'est pas trop insistant. De toute façon, ce n'est pas son genre d'être mal à l'aise, bien au contraire. Elle a toujours ce côté sûre d'elle qui est très déterminant. Elle ne se laisse pas démonter si facilement. Lorsqu'il s'agit de faire face à une personne, elle est parfaitement capable d'être froide et cruelle dans ce qu'elle dit. Elle a une petite double personnalité, mais qui est réellement utile pour survivre dans cette ville. Elle ne peut pas se permettre d'être gentille avec tout le monde, surtout avec les gens qu'elle ne connait absolument pas.

Ainsi, attendant qu'il arrive vers elle, Lena sort son blackberry de son sac, envoyant quelques messages à des amis. Et lorsqu'elle vit le jeune homme avancé dans sa direction, elle n'y prêta pas non plus la plus grande des attentions. Il se pencha, lui demandant ce qu'elle voulait. Là, elle arqua légèrement un sourcil. Était-il ignorant à ce point là ? C'en était presque drôle... Elle ne répondit pas de suite, préférant répondre à un message avant de sourire narquoisement au barman, affichant ce petit sourire en coin qui avait cette teinte de moquerie certaine. Mais il aurait au moins pu s'excuser de l'attente, ce qu'il ne fit pas.

« Un whisky, si ce n'est pas trop demander. » lâche-t-elle d'une voix assez froide et sèche. Pourtant, elle pourrait avoir un tout autre comportement, mais là, elle est profondément agacée. Elle ne le fait pas exprès, c'est comme un mécanisme qui se met en marche lorsqu'on l'agace. Elle devient froide et ne pense plus à autre chose. Il faut juste qu'elle reste ainsi, parce qu'elle n'aime pas le comportement qu'il a eu.

« Vous êtes nouveau, non ? » demande-t-elle par simple curiosité. « Je ne vous avais jamais vu dans le coin, et il est rare que Chad engage des personnes qu'il ne connait pas.. Étrange. » glisse-t-elle avec toujours ce sourire narquois aux coins des lèvres, cherchant à lui faire passer un message important à travers ses paroles qui semblent pourtant anodines à l'oreille de ceux qui ne savent pas qui elle est. Mais pour les autres, ils savent ce que cela insinue réellement.

On dit toujours qu'il est bien mieux de savoir que de rester dans l'ignorance ? Mais souffrons nous vraiment de ce que l'on ignore ? Dans la situation de Jen peut être aurait-il mieux valu qu'il sache. Pourtant, il ne s'en portait pas plus mal. Du moins pour l'instant. Il n'avait pas analysé comme il fallait la situation qu'il vivait ni même les signaux qu'il recevait en provenance de l'extérieur. Ses regards plus qu'admiratifs envers la jeune femme comme s'ils lui devaient une dette à vie, à moins que ce ne soit de la crainte. Pourquoi n'avait-il pas perçu un tel niveau intérêt ? Il ne le savait. La théorie à laquelle il avait préféré adhérer était dans ce cas, bien plus simpliste, et pourtant, il ne l'avait pas trouvée erronée. Comment aurait-il pu savoir ce qu'il ignorait ? Un manque certain d'attention surtout et d'interprétation aussi. Peut être n'avait-il pas envie de sombrer dans la paranoïa croyant qu'il n'était entouré que par des Ferguson.

S'accoudant face à elle, la jeune femme arqua un sourcil. Avant de lui répondre, elle finit de taper son texto avant de lui prêter attention. Genre de comportement qu'il ne lui était pas inconnu à contrario d'elle. Lorsqu'elle prit alors la parole c'est sur un ton sec et glacial qu'elle lui répondit.

–Pas de problème. Lui dit-il avant de s'activer à faire sa boisson.

Était-elle du genre à juger sur les apparences, à s'en satisfaire sans chercher plus loin, donc dans son cas, à s'arrêter à son statut de barman loin d'être très haut dans la caste sociale. Mais que pouvait-il à avoir à faire ? Après tout, elle n'était qu'une cliente comme les autres, certes, très mignonne mais loin d'être une connaissance de longue date. Il s'en serait souvenu sans aucun doute. Alors qu'il lui remplissait son verre, elle reprit la parole s'adressant à lui. un demi-sourire se fit visible sur ses lèvres avant qu'il ne dépose une petite serviette sur le comptoir sur laquelle il posa son verre. Lui faisant face, il lui répondit, ne détachant pas ses yeux des siens.

–C'est exact ! Vous semblez bien connaître le boss, on dirait … C'est pourtant bien la première fois que je vous vois ici.

Il n'avait pas remarqué que tous les regards s'étaient posés sur eux deux, du moins tous ceux des personnes se trouvant à proximité. Il aurait vraiment aimé qu'on lui dise qu'il avançait sur une pente glissante avant qu'il ne commence sa lancée, mais c'était déjà bien trop tard pour lui. Les Ferguson étant une famille affluente et aux membres très soudés. il était, pour un mec dans son genre à s'en désintéresser totalement, difficile d'en connaître les liens de parenté ou d'alliance qui les unissaient les uns aux autres. Un vrai casse tête chinois dont il n'avait envie de s'embrouiller l'esprit à en connaître tant d'étroitesses. Sa vie lui suffisait amplement pour ce qui était de l'imperfection et de la pauvreté. Pourquoi aller se préoccuper des problèmes des autres quand on avait les siens à gérer avec déjà tant de mal ? Non, Jensen n'était pas avenant et intéressé de nature. Il fallait qu'un élément perturbe son attention, vienne à lui comme le plus pur des hasards pour alors piquer sa curiosité. Chose qu'elle venait de faire par ses airs de provocation et de désinvolture. Un comportement qui marque, qui ne laisse pas indifférent. Chose à laquelle il était plus que réceptif. Mais on ne contrôle pas ce genre de sensations si ?

Elle y allait peut-être un peu fort, elle l'admettra elle-même. Seulement, elle ne s'explique pas pourquoi elle se comporte ainsi. Peut-être parce qu'elle a l'habitude de tout avoir en une seconde, que les gens soient toujours là quand elle en a le besoin. Depuis toute petite, la jeune femme est entourée. Que ce soit par ses parents ou son frère, mais aussi les autres membres de sa famille, même ceux en qui elle n'a pas toujours confiance.. Enfin, cela est-il vraiment une question de confiance ? Pas vraiment. Mais plutôt un ressentiment à l'égard d'une personne. Le cousin de son père qu'elle ne porte pas réellement dans son cœur. Certainement à cause de ce que sa femme subit quotidiennement. Elle n'a pas l'habitude voir cela. Elle, sa mère est une femme qui a du caractère et du répondant. Elle n'hésite pas à donner son avis à son mari et celui-ci la respecte. Le père de Lena n'est pas le genre d'homme à croire qu'une femme n'est bonne qu'à faire la cuisine. Et bien qu'il était réticent face à l'arrivée de sa jeune fille aux entrainements, elle a su lui prouver qu'elle en était capable, et qu'elle était douée dans ce qu'elle faisait.

Ainsi, l'attente n'est pas une chose qu'elle est en mesure de supporter. Bien qu'elle a conscience du monde qu'il y a ce soir, elle n'aime pas cela. Lorsque le barman vint enfin vers elle, Lena prit tout son temps pour lui répondre, préférant envoyer un message avant, lui répondant ensuite sur un ton sec et glacial. Peut-être trop ? Cela ne fait aucun doute. Elle aurait du y mettre un peu du sien, mais elle n'a pas su se contrôler, il fallait que son mécontentement sorte au grand jour. Quitte à passer pour une fille superficielle qui se pense être le centre du monde. Même si ce n'est pas le cas, il n'est pas rare que les gens s'arrêtent sur la première impression, ne cherchant même pas à connaître davantage la personne. Non, une remarque, un regard, et cette personne est catalogué.

Alors qu'il remplissait son verre, elle lui adressa une nouvelle fois la parole. Lui faisant une petite remarque qui aurait dû lui mettre la puce à l'oreille, mais rien. Il ne semblait pas comprendre alors que les personnes autour d'eux avaient déjà fais ce rapprochement. Néanmoins, elle esquissa un petit sourire lorsqu'il revint vers elle, posant son verre sur une serviette sur le bar.

« Et comment que je le connais... Chad est mon cousin. » glisse-t-elle dans un fin sourire en saisissant son verre. Le portant à ses lèvres, elle but une petite gorgée avant de le reposer et se concentré sur le jeune homme. « Je suis Helena... Helena Ferguson. » dit-elle en lui tendant la main, signe de politesse, mais aussi une façon de dire qu'elle s'excuse de son comportement de tout à l'heure.

Lena n'est pas méchante, bien au contraire. Elle peut être un ange, le plus beau du monde. Mais il ne faut pas la chercher, là, elle devient un démon, le pire. Elle a une sacrée personnalité et un tempérament de feu qui en fait battre en retraite quelques uns. Elle a cette capacité déconcertante à se sortir de toutes les situations sans aucun problème. Elle manie assez bien l'art du compliqué, alors forcément, cela ne lui pose plus aucun problème à présent. Même si parfois, ce n'est pas aussi simple que ça. Il faut qu'elle fasse des efforts, mais ce n'est pas si évident que cela en paraît.

Jensen était on ne peut plus intéressé par la jeune femme. Lui qui ne se contentait que d'être agréable au possible, sans vraiment être retenu par telles ou telles personnalités qui venaient s'accouder au comptoir du bar pour y siroter un cocktail et échanger quelques paroles toujours futiles. Mais avec elle, rien de tout cela. Il ne savait pas pourquoi elle avait engagé la conversation avec lui, si c'était par simple curiosité ou si alors elle cherchait à savoir quelque chose de précis. Mais le fait qu'elle connaisse Chad appuyait un peu plus solidement ses suppositions la concernant. Cependant, elle n'avait pas agit comme la plupart des personnes. Une approche différente, que l'on remarque sans aucun doute. Peut être n'était-il que victime de l'innovation … Chose dont il serait très étonné, n'étant pas du genre à juger sur la première impression bien souvent contraire.

Les gens restaient cependant toujours captivé par leurs conversations comme s'il n'y avait rien de plus vital au monde. Jen' leur lança un coup d'œil leurs faisant détourner le regard pour un temps. Parce qu'il était sur qu'une fois le dos tourné, ils ne pourraient s'empêcher de les observer. Le comportement humain peut parfois être si étrange … Jensen ne comprenait pas ce qu'il pouvait y avoir de si passionnant à s'occuper des affaires des autres plutôt que des siennes. Ça le dépassait. Mais dans le milieu huppé dans lequel il avait atterri, peut être était-ce monnaie courante. Que tout finissait par se savoir. Alors il n'avait pas fini d'entendre parler de eux deux si tel était le cas.

Alors qu'il s'était accoudé pour lui faire la conversation et prendre sa pause en quelque sorte, elle lui répondit tout aussi directement et il comprit qu'elle ne bluffait pas. Son cousin qu'elle avait dit … Il réalisa alors la connerie qu'il venait de faire, et comprit ensuite le pourquoi la jeune femme attirait tant les regards. Qu'il avait pu être bête de croire qu'il n'était pas cerné. Le rythme de vie qu'il avait connu auparavant était à Volusia bien différent. Le jour et la nuit. Un tout autre contexte d'existence auquel il ne semblait pas s'être complètement fait. Chose qu'il se devrait d'apprendre. Agir avec extrêmement de précaution. Il la vit porter son verre à ses lèvres alors qu'il était en train de recoller les pièces du puzzle entre elles. La jeune femme se présenta à lui, dissipant toute ambiguïté quant à son identité. Lui tendant la main il s'en saisit la regardant avec un petit sourire.

– Enchantée Helena, je vous prie d'excuser mon ignorance, je n'avais pas fait le rapprochement avec vous et … Jensen Letham, bien que le nom n'ai aucune importance …

Oui en comparaison c'était certain. Finalement, il allait peut être devoir se mettre aux écrits et autres revues de presse pour éviter ce genre de désagréments la prochaine fois qu'il tomberait sur un ou une Ferguson ou tout autre personne de la parenté à cette famille que ce soit de loin ou de près. Il avait cependant senti le changement d'attitude de la jeune femme à son égard, le ton de sa voix s'étant fait plus doux aussi. Peut être était-elle prête à passer sur son écart de conduite. Pourvu qu'elle n'aille pas en toucher deux mots à Chad. Ce n'était pas une faute professionnelle, mais les faux pas ne sont néanmoins pas approuvé pour autant.

Bien que cela pouvait paraître cruel et méchant, cette situation était amusante aux yeux de la jeune femme. Rares sont les gens qui ne savent pas encore qui fait parti de la grande famille Ferguson. Ce sont tous des visages connus. Et même si elle aurait voulu resté dans l'ombre, elle n'aurait pas pu le faire. Mais de toute façon, ce n'est pas ce qu'elle voulait. Elle a toujours voulu prendre part à cette guerre, même si ce n'était pas une bonne idée. Mais Helena se fiche de l'avis des autres, au contraire, elle fait seulement ce qu'elle a envie de faire. Elle aurait pu être comme toutes les autres femmes, soumises et incapables de prendre une décision seules. Mais ce n'est pas ce qu'elle voulait. Un caractère trop fort. Trop déterminée. Trop passionnée pour cela. Il fallait qu'elle trouve une vraie occupation. Cette guerre étant là depuis toujours, ça lui paraissait comme une évidence. Et dans un sens, cela lui a rendu service.

Grâce aux entrainements, elle sait se battre correctement. Elle est même capable de se servir aisément d'une arme à feu sans que sa main ne se mette à trembler au moment fatidique. Et puis, c'était aussi une façon d'être proche de son frère. Encore plus qu'ils ne l'étaient. Tyler est comme elle. Un fort caractère. Et il a bien fallu qu'elle le calme lorsqu'il voulait s'opposer à certaines décisions de son père. Elle a toujours su le calmé et faire en sorte qu'il ne dise rien qui pourrait lui rapporter des ennuis. Ils se comprennent sans aucun problème. Ils n'ont pas besoin d'avoir des grandes discussions pour savoir si ça va ou non. Un regard. Un mot. Un geste peut suffire à cela. Une complicité hors du commun entre un frère et une sœur.

Cessant enfin son petit jeu, Lena se présenta au serveur sans plus attendre. Au départ, elle n'a pas été très cool, elle le sait très bien. Mais rares sont les fois où elle s'excuse pour son comportement. Pas son genre. Du moins, pas quand elle ne connait pas la personne face à elle. Si ce serait un ami et qu'elle aurait fait ou dit n'importe quoi, elle aurait présenter ses excuses. Mais là, c'était une façon comme une autre de le faire. Mettre un terme à ce petit jeu qui ne devait pas être très amusant pour lui. Mais que les gens autour d'eux ne cessaient de suivre comme un échange entre deux joueurs de tennis. Les gens sont curieux.. Ce n'est pas un scoop.

Il prit sa main, la serrant doucement dans la sienne, se présentant à son tour. Retirant sa main de la sienne, elle balaya ses excuses d'un geste de la main en le regardant. Prenant une nouvelle fois son verre, elle but une gorgée avant de lui répondre.

« Ce n'est rien.. C'est juste rare les gens qui ne sont pas au courant. Mais dans le fond, l'anonymat a du bon par moment. » glisse-t-elle dans un petit sourire à son attention.

Détournant le regard pour le porter sur les personnes qui les épiaient depuis tout à l'heure, elle eut un soupir d'exaspération. Ils détournèrent le regard, mais elle n'est pas sans savoir que cet échange sera quand même suivi. D'une manière ou d'une autre. Les gens jasent, ils parlent beaucoup trop. Parfois pour rien dire. Simplement pour l'envie de colporter des ragots qui feront parler les gens pendant plusieurs jours, parfois des semaines. Même le plus petit événement est reprit, remodeler selon les envies et il prend des proportions énormes.

« Alors, Jensen.. Vous êtes en ville depuis combien de temps ? » demande-t-elle par curiosité. Parce qu'elle aime bien savoir des choses. Même comme ça. Simplement pour le plaisir de discuter, sans penser à mal, comme toutes les autres personnes accoudés à ce bar.

La facilité n'a jamais été une chose que la jeune femme apprécie. Au contraire, elle recherche toujours la difficulté. Peu importe ce qu'elle fait, ce qu'elle dit, il y a toujours une part de difficulté dans ce qu'elle choisit. Ce choix de faire pleinement parti de cette guerre, d'être confronté aux personnes qui voudraient la voir morte plutôt que vivante. Elle aurait pu échapper à tout ça d'une certaine manière. Faire comme toutes les autres femmes, être bien tranquillement chez elle. Avoir un travail, sans pour autant être fermement ancrée dans cette guerre qui dure depuis des générations. Mais elle ne le pouvait pas. Parce que ce n'est pas elle. En la voyant, on penserait que c'est une jeune femme fragile, sans aucune défense. Mais cette apparence cache une force de caractère incroyable que personne ne soupçonne. Seuls ses proches peuvent être en mesure de le savoir. Elle a ce côté un peu dingue, de vouloir toujours faire n'importe quoi quand elle le peut. Mais elle est aussi sérieuse et obstinée. Quand elle décide quelque chose, elle va jusqu'au bout de ses idées.

Lors des premiers entrainements, ce ne fut pas facile pour elle. Déjà qu'elle était la seule fille, mais en plus, elle avait la pression à cause de ça. Elle ne devait en aucun cas décevoir les gens, notamment son père qui avait finalement accepté qu'elle soit là. Elle s'était donner à fond, et elle a réussit. C'est une chose qu'elle aimerait faire comprendre à tout le monde. Quand on veut quelque chose, il faut tout faire pour l'obtenir et non pas seulement nourrir l'espoir que ça viendra tout seul sans rien faire du tout. Malheureusement, tout le monde ne comprend pas cela, alors elle laisse tomber parfois. Inutile de convaincre quelqu'un qui ne croit absolument pas en lui. Souvent, elle se dit qu'elle devrait être moins froide lorsqu'on la rencontre la première fois, mais elle ne sait pas faire autrement. Et cela se dissipe somme toute assez rapidement lorsqu'elle commence à être en confiance.

C'est pour cette raison qu'elle avait parler ainsi au barman. Froide, distante. Elle n'avait émit aucun jugement, mais elle ne s'attendait pas à ce qu'il soit si long à venir vers elle. Elle ne se doutait pas qu'il ne savait pas qui elle était. Il faut que dans cette ville, le nom « Ferguson » est très répandu, les gens en parlent souvent. Personne normalement ne devrait être en mesure d'ignorer qui ils sont. Mais il est l'exception qui confirme la règle. Elle reprit un air souriant, ne voulant pas resté sur ce malentendu. Après tout, il n'y peut rien. Ainsi, après les présentations, Helena voulut en savoir plus sur Jensen, lui demandant depuis combien temps il était là. Écoutant sa réponse, elle hocha doucement la tête en souriant.

« C'est normal ! Cette boite de nuit est la meilleure de toute la ville.. Évidemment, je suis impartial en disant cela.. » glisse-t-elle sur le ton de plaisanterie. Il serait vraiment étrange si la jeune femme se mettrait à critiquer la boite de nuit de son cousin. Chose qui n'arrivera jamais puisqu'elle s'y rend assez souvent et elle aime beaucoup cet endroit. Surtout que c'est la seule boite de nuit du quartier Ouest, autant en profiter un maximum.

A la question de Jensen, Lena eut un fin sourire avant de lui répondre. « En fait, je viens de finir mes études de marketing.. Et pour le moment, je donne des cours de soutien aux étudiants à l'université.. Disons que je ne sais pas encore exactement où m'orienter.. Mais je ne perds pas espoir ! » répondit-elle tout en souriant.

Il faut dire qu'elle a beaucoup à faire avec les étudiants et cette guerre qui fait rage, pour trouver un peu de temps et savoir vers quoi s'orienter, il faut un minimum de courage qu'elle n'a pas pour le moment.

À présent qu'il savait qui elle était ou tout du moins dans les grandes lignes, il pouvait aisément quantifier la difficulté de sa position et le quotidien jamais sans risques de sa vie. Être contrainte de se forger un caractère d'acier pour ne pas être écrasée, pour ne pas être oubliée dans les décombres. À vivre sur le qui-vive à chaque seconde bien que profitant du plus doux des conforts. Un antagonisme qui posait encore bien trop de questions à Jensen et dont il n'avait pas toujours les réponses, mais peut être qu'en la connaissant mieux, si elle le laissait l'approcher d'un peu plus près, alors peut être qu'il saurait. Cette immersion même temporaire le fascinait autant qu'elle le rebutait. Oui, il ne voulait pas une seule seconde de sa vie. Pas que la sienne lui suffisait amplement bien qu'elle avait ses hauts et ses bas, comme tout le monde, seulement qu'il ne voudrait jamais avoir à vivre les dégâts d'ainés qu'on ne connait, dans leur cas, que de noms. C'était triste à dire, et surement ne le lui dirait-il jamais, mais c'était ainsi qu'il le ressentait. Il ne se sentait pas pour autant supérieur dans une telle position, ce n'était pour lui rien qu'une constatation sans plus d'appui, sans plus d'importance. Il n'en tirait aucun bénéfice, ça n'arrangeait rien à sa condition.

Néanmoins, il ne s'était pas trompé sur elle. Un petit rire monta du fond de sa gorge alors qu'il l'entendit parler de la boite de son cousin, donc. Il était clair qu'elle n'était pas impartiale sur un tel point, cependant, elle n'avait pas tout à fait tort. Il ne lui arrivait que rarement de fréquenter les boites de nuit, une fois de temps en temps quand l'âme lui disait, mais jamais ce que l'on qualifie de régulier. Et il devait dire qu'il avait préféré l'ambiance de cette boite plutôt que tout autre de l'autre côté de la ville. Il avait fait sa demande d'emploi ici avant de tenter ailleurs. Il commençait toujours par ses préférences et déclinait en conséquence. D'habitude c'était toujours ce qu'il plaçait en dernier recours qui avait le plus de prise, mais cette fois, la donne avait changée et il n'en était que plus ravi.

Helena donnait une première impression déformée, préférant son masque de froideur à tout autre comportement chaleureux sans raison, et il respectait son point de vue. À l'extérieur, Jensen ne misait pas autant sur le relationnel qu'à son taff. Les critères le voulaient ainsi, il s'ajustait à l'optique, point barre. Cependant, il avait acquis bon nombre de savoirs-être qu'il ne négligeait pas depuis qu'il bossait dans cette boite. Il avait énormément gagné à travailler ici que partout ailleurs dans tous les jobs qu'il avait passé. Le facteur humain dominant dans sa profession, il avait du travailler son approche aux autres, et il n'en dédaignait pas les effets qu'il ne jugeait que positivement. Ça lui avait permis de gagner en assurance et en ouverture.
Il perçut un fin sourire se dessiner sur son visage, alors qu'il lui avait retourné sa question. Il se demandait bien ce que cela pouvait signifier. L'écoutant avec attention, il en saisit ses propos, tout comme ses pensées, immédiates tout autant. Il lui rendit son sourire, avant de lui répondre tout aussi sincèrement.

– Faut pas, tu as encore le temps avant d'être obligé de te positionner. Enfin, je voulais dire vous …

Il ne savait pas si c'était la discussion qui était plus encline à un tutoiement ou alors tout autre raison, mais quoi qu'il en soit, il avait une fois de plus réagit que trop tard. Elle allait vraiment finir par croire qu'il le faisait volontairement. Alors qu'il n'avait fait que lui répondre spontanément. Il l'avait sentit légèrement hésitante, peut être même un brin anxieuse alors avait-il voulu la rassurer aussitôt, ne mesurant pas l'aise de ses propos. Déformation professionnelle dirons-nous. Il n'arrivait à expliquer un tel comportement à son égard que de cette façon là. Il ne pouvait prétendre la connaître, pas plus que d'arriver à la cerner, il n'en savait que trop peu la concernant. Néanmoins, malgré leur début plutôt chaotique, il avait un bon feeling. Il ne pouvait dire où cela les mènerait, mais quoi qu'il en soit, il avait un pressentiment positif.

Il n'y a rien de plus incertain que l'avenir. Surtout dans cette ville. Faire des projets pour le futur n'est pas dans les options que la jeune femme a choisit. Elle ne peut pas se permettre de créer sa vie soudainement, de se dire qu'elle fera telle chose dans quelques années. Non, parce qu'elle n'en sait absolument rien. Elle ne sait même pas si elle sera encore là dans six mois, un an, peut-être plus. Elle n'a pas envie de faire quelque chose, se dire qu'elle a encore toute la vie devant elle pour faire ce qui lui plait. Pourtant, tout le monde – ou presque -, le fait. Mais pas Helena. Pas le temps, pas l'envie, pas assez d'énergie après une longue journée. Ce qu'elle fait tous les jours est semblable à un autre. Identique à la vie d'une personne qui a un train de vie auquel elle tient. Par peur de l'inconnu, peut-être. Tout est possible. Mais ce n'est pas ce qui effraie le plus la jeune femme. Non. Le plus effrayant c'est se dire qu'un jour, elle peut tout perdre. Comme ça, trop brutalement. Sans rien voir venir. Et ça, c'est complètement flippant.

Pourtant, à l'époque du lycée elle n'aurait pas eu toutes ces hésitations. Non, elle aurait foncer tête baissée dans mille et un projets, s'extasiant en disant que ça serait génial. Oui, elle faisait des projets, avant. Lorsque la vie était encore belle à ses yeux. Quand elle avait encore un but précis. Bien que cela paraît si étrange, si puéril, mais elle se voyait faire sa vie avec Jayden. Pour elle, c'était comme ça. Leur amour était si fort, si unique. Il était l'homme de sa vie, l'homme avait qui elle aurait fini ses jours. Mais lui ne pouvait pas penser la même chose. Il se savait condamner et Lena était son rayon de soleil durant cette période grise. Elle ne savait pas qu'il était malade. Mais en y repensant, elle comprend pourquoi il souriait si tristement lorsqu'elle disait toutes ces choses. Il savait très bien que jamais, jamais il n'aurait la chance de vivre tout ça. Mais elle l'a comprit que bien trop tard.

Alors, a-t-elle vraiment encore le temps comme Jensen le dit ? Oui et non. Oui, si elle est optimiste, elle peut se dire qu'elle a toute la vie devant elle. Mais si elle regarde les choses en face, elle se rend compte que non. Parce qu'elle risque sa vie tous les jours. Rien que le fait de se rendre dans le centre ville peut être un risque, un énorme risque. Elle a déjà faillit perdre la vie une fois, elle sait très bien que cela peut se reproduire, sans qu'elle s'y attende. Alors le temps, elle ne l'a pas vraiment. Mais celui qu'elle a, elle ne le gaspille pas avec des problèmes qui n'ont pas lieu d'être. Non, parfois les choses glissent sur elle comme la pluie glisse sur les vitres. Pas le temps de s'en faire pour tout et rien. Le plus important étant de profiter pleinement de la vie.

« Tu peux me tutoyer, ça ne me dérange pas. En fait, je préfère. Quand on me vouvoie, j'ai l'impression d'avoir quarante ans, c'est pour dire.. » glisse-t-elle dans un fin sourire.

Ce qui n'est pas entièrement faux. Elle n'aime pas le vouvoiement, elle trouve ça lourd et chiant. Cela enlève toute envie d'avoir une discussion. C'est mettre une certaine distance entre soi et les autres, ce qui n'est pas forcément une bonne chose. Mais dans bien des cas, c'est le mieux qu'il y a à faire. Pour certaines personnes, c'est un signe de respect. Enfin, Helena se fiche de tout cela, elle préfère qu'on la tutoie, ce qui l'arrange fortement. Néanmoins, une question heurta l'esprit de la jeune femme. Relevant doucement son visage vers Jensen, elle prit un air assez pensif, réfléchissant quelques secondes.

« N'empêche, je me demande.. Pourquoi être venu à Volusia ? Cette ville n'a pourtant pas une excellente réputation avec cette guerre. » demande-t-elle toujours autant curieuse, intriguée par la raison qui l'aurait pousser à se rendre dans cette ville.

La relation qu'il entretenait avec la jeune femme retrouvait forme normale. Enfin, il s'y retrouvait mieux à présent. Pas que Lena perdait en mystère ou intérêt à son égard, non, simplement il sentait juste la tension redescendre. Entre eux, autour d'eux. L'ambiguïté se dissipait, les regards se détournaient enfin, ils redevaient peu à peu un homme et une femme qui discutaient au comptoir d'un bar. Néanmoins, restait des facteurs non négligeables qui donnaient à leur relation unicité et exclusivité. Lui n'était que le barman, un homme comme les autres en somme mais avec lequel, elle, digne descendante de la lignée des Ferguson tentait de créer de l'affinité. Et même si chaotique avait été leur début pour elle comme pour lui, il n'en appréciait que plus ce qui était en train de prendre forme entre eux. Sans nom défini, sans plus de signification, une conversation des plus amicales. Certes, il était amené de par son travail à d'avoir des contacts très rapprochés avec le public. Néanmoins, chaque rencontre avait sa particularité, sa part de singularité. Et pourtant, il en avait vu du monde défiler devant ses yeux, s'agitant comme s'activent des fourmis dans une fourmilière. Mais il n'oubliait pas un seul visage quand il lui était familier. Sa mémoire, marquée à jamais. Allant des rencontres d'un soir dont jamais il ne reverrait par ici les têtes aux traits coutumiers des habitués.

Et les personnalités comme elle qu'il ne connaissait que de nom, l'information oblige, il était incapable d'y associer un visage. Il ne lisait pas les tabloïds. Il n'avait que faire de savoir si Mr un tel raquette un autre pour quelques zéros de plus sur son compte en banque. Pas plus que de savoir qui vit des parties de jambes en l'air endiablées avec une telle autre tous les samedis soir. Peut être que c'était le contact physique qui lui permettait d'encoder et de se souvenir. Il ne pourrait le dire. Mais maintenant qu'était fait ce contact là avec elle, il savait qu'il ne commettrait plus la même erreur deux fois. Helena lui répondit avec agréabilité relevant le fait qu'elle n'était pas trop pour le vouvoiement, avis qu'il partageait totalement mais qu'il ne s'autorisait pas sans permission. Question de politesse, de bonnes conduites … Peut être les deux au final. Son éducation, ou du moins les traces qu'il en restait, n'avait peut être pas totalement disparu.

– Accordé ! Lui dit-il dans un sourire.

Il passa un coup d'éponge pour faire disparaître les précédentes traces de verres lorsqu'elle capta à nouveau son attention. Réfléchissant à sa question, donnant à sa réflexion quelques secondes, il lui répondit avec franchise :

– Ici ou ailleurs … Ce n'est pas vraiment la tranquillité que je recherche. Je vais là où le vent me porte. Mais en dehors de ce fait là, j'aime beaucoup cette ville, les gens ont une autre mentalité ici. Je crois qu'il le juge pas trop vite. (Il marqua une pause avant de reprendre, captant son regard.) Et toi, tu n'a jamais eu envie d'ailleurs ?

Lui était sans attaches, c'était bien plus simple, des tas de questions n'avaient pas leur place, mais ce n'était pas pour autant qu'il trouvait un tel fait supportable. Bouger, et bouger encore. Il ne faisait que ça. Il ne comptait plus les villes dans lesquelles il avait fait escale. Pas plus que les personnalités qu'il avait connu. Aussi futile que passe le temps. On garde des bons moments, certes, pourvu qu'ils restaient à cet état de fait, et … des moins bons, obligatoire. Pour Lena, sa vie était ici, entre les quatre murs de Volusia. Elle n'avait pas d'autre chez elle, alors que lui, pouvait partir quand il voulait. Il pensait que ce n'était pas pour autant qu'elle ne souhaitait pas prendre le large, ou rêver de paix et de tranquillité … Une fois, juste une seule fois.

Si elle a déjà eu envie d'ailleurs ? Oui et non. Parfois, c'est le cas. Cette ambiance ici n'est pas la plus saine, ni la plus agréable à vivre au quotidien. Du moins, pour ceux qui débarquent à peine. Ils se disent que ce n'est pas l'endroit le plus parfait, alors ils partent. Mais Helena, a-t-elle vraiment le choix de quitter cette ville ? Voir ailleurs ? Découvrir de nouveaux horizons ? Pas réellement. Peut-être que si elle aurait le choix, elle le ferait sans aucune hésitation, mais là... Ce n'est pas un luxe qu'elle peut s'offrir. Partir alors que cette guerre fait rage serait synonyme de trahison, plus jamais elle ne pourrait remettre les pieds à Volusia, elle risquerait pour sa vie. Mais cette fois, plus seulement à cause du clan adverse. Et puis, elle n'aura peut-être jamais la force nécessaire pour quitter cet endroit, elle est née ici, elle a tout ses repères. Sa famille, ses amis, son univers. Être ailleurs serait une grande perte de toutes ces choses, il faudra réapprendre à vivre, sachant que derrière elle, elle laisse des personnes qui comptent à ses yeux. Non, elle ne le pourrait pas, c'est impossible. Elle tient trop à son frère pour le laisser seul, elle tient trop à toute sa famille pour avoir l'idée de partir pour ne plus jamais revenir. Car si elle part, Lena est sûre de ne plus remettre les pieds ici. Trop de souvenirs malheureux, trop de souffrances, trop de drames. Elle aurait besoin de voir et découvrir autre chose. Un monde où les choses se passent mieux, où la guerre n'est pas présente tous les jours. Une vie plus stable, moins dangereuse. Un endroit où elle ne risque pas sa vie à chaque coin de rue. Mais là encore, ce n'est pas gagner.

« Un jour, tout s'arrangera, j'en suis convaincu... Nous serons heureux et nous irons partout dans le monde, juste toi et moi. » avait promis Jayden quelques mois avant sa mort. Elle n'était qu'une adolescente, amoureuse de ce jeune homme qui l'était autant qu'elle. Ils étaient si heureux ensemble, mais le destin ne voulait pas qu'ils le soient encore longtemps. Après la mort de Jayden, Lena ne croyait plus en rien. Si avec lui la vie était semblable à un conte de fée, qu'elle voyait toutes les couleurs de l'arc-en-ciel tous les jours, après qu'il ait disparu, ce fut tout le contraire. La vie était terne, grise, elle n'avait plus aucune valeur. Les gens n'avaient plus d'importance, elle voulait mourir et le rejoindre. Elle sombra lentement dans la dépression, mais grâce à l'amour de ses proches, grâce au soutien de son frère, elle a lentement remontée la pente. Tout doucement, prenant son temps, cherchant à quoi s'accrocher pour se relever davantage encore. Et finalement, elle a réussi, mais elle n'était pas seule. Alors aujourd'hui, peut-elle tout quitter ? Plaquer toutes les personnes qui ont toujours été présentes pour elle ? Non, impossible.

« Parfois, ça arrive... Mais je sais que jamais je ne quitterais cet endroit.. Aussi étrange que cela puisse paraitre, ici, c'est ma vie... Ma famille, mes amis, ma guerre... Une guerre qui dure depuis des générations, partir serait trahir les convictions des anciens, et ça... Ça, c'est un acte impardonnable. Je doute que cette lutte prenne fin un jour, alors, je sais que tout ce que je verrais des autres endroits, c'est seulement à la télévision ou dans les bouquins. Cela étant dit, c'est mieux que rien.. Bien que cela ne soit pas suffisant. »

Évidemment, ce serait bien d'être loin, ne serait-ce que quelques jours, mais elle n'a pas le droit. Attrapant son verre, elle termine son whisky en deux gorgées, reposant ensuite son verre sur le comptoir. Réfléchissant quelques secondes, Lena reste perdue dans ses pensées, des souvenirs qui remontent à sa mémoire, souvenirs heureux, malheureux. Un mélange des deux. C'est un peu ce qui résume sa vie. Du bonheur et de la tristesse. L'un sans l'autre n'irait pas. Cela fait un certain équilibre, dans un sens, c'est mieux.

« Mais je crois qu'on ne se contente jamais de ce qu'on possède déjà... Nous en voulons toujours plus, et ça, c'est quelque chose d'assez incompréhensible. Un homme qui possède beaucoup d'argent en voudra davantage encore, l'habitude étant prise, impossible de revenir en arrière. La vie est une succession de choix, il faut savoir faire les bons. Et même si on se casse la figure, on se relève toujours. Vivre avec l'idée d'un échec, c'est insupportable. On se relève pour vaincre... A tort ou à raison. » termine-t-elle en souriant légèrement.

Sa vision des choses avaient quelque chose de raisonné mais aussi de si énigmatique. Peut être était-ce dans le fait qu'il adhérait à son idée remise dans son contexte et d'un autre côté, parce qu'il n'y adhérait que par valeurs communes. Aucunément, il n'avait connu ce qu'elle lui parlait et tentait de lui faire comprendre. Alors oui, il était du même avis qu'elle, parce que par empathie, c'était ainsi qu'il agirait, ou du moins comme il le ferait s'il était elle. Et d'un autre côté, il se sentait si hors contexte … Elle se retrouvait engluée malgré elle, dans une guerre qui dépassait même ses commanditaires, mais qui ne prenait fin pour autant alors que lui, n'était rien d'autre que spectateur averti de la scène. Le regard qu'ils pouvaient y porter était inévitablement différent. Et dans sa formulation, il se prenait à rêver qu'il pourrait être celui qui serait en mesure de lui faire connaître toutes ses choses. Étranges idées, mais loin d'être incompréhensibles. On pense exclusivité, forcément les pensées s'orientent dans ce sens. Il prendrait surement conscience plus tard ô combien ses cogitations pouvaient être stupides par instants. Il ne la connaissait même pas, mais leur échange lui était tout ce qu'il y a de plus agréable. Peut être était-ce dans le fait qu'elle ne discutait pas qu'au barman qu'il était, mais bien à Jensen. Il n'avait pas l'impression d'être dans une conversation purement professionnelle qui lui amenait à en savoir beaucoup sur beaucoup de monde. Généralement, ses conversations là se basaient sur l'écoute et un retour toujours positif, mais en rien, un avis personnel réclamé et entendu. Alors qu'avec Helena, tout lui semblait différent. La façon qu'ils avaient de communiquer était différente. Il lui portait un intérêt bien plus vif.

Il saisit ses paroles avec attention, et bien qu'indirectement influencé, il ne pouvait qu'être d'accord avec elle. Personnellement, rares étaient les fois où il avait des idées de grandeur. L'argent ne l'intéressait pas, le luxe ne lui faisait pas briller les yeux et l'envie et la jalousie ne l'atteignaient pas. On ne pouvait en clair avoir d'emprise sur lui. C'était certes, emmerdant, mais c'était ainsi. Et c'était peut être pour cette raison qu'il était barman à l'Outrageous. Enfin, ça y avait surement fait. Néanmoins, il restait d'avis que lorsqu'on dispose de tout cela, difficile est le fait de ne pas vouloir en posséder encore plus. Le peu qu'il avait lui, lui suffisait. Il n'avait pas de gros besoins, ne faisait jamais de grosses dépenses. Et là où il se pensait normal, à Volusia, il sombrait dans son contraire. Mais peut être était-il fort de cela ? Il ne pouvait le dire … Tout ce qui était formulable était qu'on ne pouvait rien tirer de lui … Enfin il aimait le penser. Qui pourrait venir s'intéresser à un quotidien comme le sien ? Qu'y avait-il à y gagner ? Là, où il répondait par un « rien » catégorique, il se sentait à l'abri.

– Ouais, j'en conviens … Helena termine alors son verre de stock en deux gorgées avant de reposer son verre sur le comptoir, le regard fixé sur ce dernier, elle reprit la parole. Il ne savait si elle disait cela à son encontre, ou si alors elle synthétisait un fait qu'elle ne croisait que trop souvent. Il surprit son sourire qu'il ne pu identifier. Il ne savait s'il était significatif d'une aberration monumentale qu'elle ne changerait pas, ou si alors c'était ses propres paroles à sa référence qui le lui avait décrocher.

– Moi, je pense que l'on est maitre de son destin. On choisit d'être le produit de notre environnement… Et pour ce qui est de ce que l'on ne peut maitriser … On agit au mieux comme il nous est possible de le faire sur l'instant, dans l'urgence.

Aussi calme et posé qu'il laissait paraître, il vivait sans cesse dans l'urgence, ses vaines mais maintes réactions pour se sortir au plus vite, pas toujours de ma meilleure façon qu'il soit, des situations les plus insupportables qui le mettait sans cesse au pied du mur. Alors oui, il ne faisait que lui exposer son point de vue, ce qu'il ressortait de ses pensées à elle et dont elle lui faisait part. Mais il n'irait jamais dire à quelqu'un la façon dont il faut vivre, et si alors il fait bien ou mal. Parce qu'il n'en savait foutrement rien … Relevant le regard sur elle, cessant son activité, il reprit la parole, complètement hors sujet de conversation mais il avait senti son départ imminent.

– Aurais-je le privilège de te revoir ?? Lui dit-il sans vraiment faire cela avec tact. Mais pressé par le temps, il lui avait été impossible de faire dans la non précipitation. Et puis, il n'avait nullement envie que leur relation s'arrête à une conversation dans un bar …