Le monde est petit ...

Invité

&

Jensen ~> Sophia

Une Vodka pomme s’il vous plait.

Invité

Samedi soir, fin de guerre. Jensen pronostiquait une nuit de foule en délire, un record de boisson servies, un nombre incalculables de belles créatures sans répression aucune à l'entrée de la discothèque. Oui la soirée s'annonçait bonne, ça ne faisait aucun doute. Les recettes seront fructueuses et il pourrait jouer son job dans toute sa splendeur. Psy pour certains, grand frère pour d'autres, mais aussi le rôle de l'inconnu à qui on dit tout sans craindre de jugement quelconque, au bon barman bien sympathique pour les habitués, le gars d'un soir … Tout autant de rencontres aussi troublantes qu'agréables qui lui avait fait gagner en sociabilité, lui d'ordinaire si replié, si retranché, si solitaire. Volusia malgré ses guerres et ses conflits, son changement et sa reconnaissance lui avait apporté beaucoup plus qu'aucune autres villes dans lesquelles il aurait fait escale dans sa chienne de vie. Malgré ses compulsions à vouloir foutre le camp, une part de lui avait soif de réussites, une première chez lui. Un besoin de cesser ses conneries ayant passé treize années de son existence tel un dépravé à enchainer embrouilles sur embrouilles pour finir par se forger une identité de raclure finie alors qu'il se savait pas si mauvais. Mais de cela, personne n'en a jamais attesté bien trop fixé sur ses actions passées loin d'être irréprochables et de son passé trouble et perturbé, ombragé de secrets et de réminiscences en tout genre qui n'en font pas sa fierté.

Et ce juge indicible à son existence qui se barre par la bombe, trop absent dans son omniprésence qu'il savait insuffisante. Plus à même de se satisfaire de croyances, de représentations abstraites pour se trouver ce qu'il fait de fixité et de stabilité. Si lamentable… Si pathétique mais nécessaire cependant. Il ne demandait pas à ce qu'on le comprenne, pas même un effort de lisibilité. Il n'attendait rien de personne. Il s'était lui même façonné à travers l'image qui n'était en rien le reflet de ce qu'il était réellement. Et bien que difficilement admissible, il assumait la pleine responsabilité d'un tel choix. Néanmoins, il souffrait tant d'invraisemblance. À présent, il aspirait à autre chose. Une telle image ne lui convenait plus. Et s'en défaire pour en construire une autre plus réelle, plus acceptable à son conscient n'était pas chose aisée. Lui seul détenteur de vérité et de connaissance… Une idée qui lui avait longtemps plu et à laquelle il adhérait encore fermement. Sauf qu'à présent, il n'y gagnait plus rien, le bénéfice s'en trouvait moindre en comparaison. Il voulait du partage, de l'implication, de l'investissement sans craindre la déchirure. Ce qui était la source de tant de ses angoisses. En d'autres termes, il sortait d'une galère pour entrer dans une autre mais surtout il cherchait durablement un moyen de faire cesser toutes ses pensées et autres allusions qui le hantaient continuellement et qui était l'origine de blessures qu'il n'avait pu panser. Peut être prônait-il enfin l'affranchissement. Ne plus être tel qu'il voulait qu'on le voit, mais tel qu'il était réellement sans masques, pas plus de biens façons. Parce que le mystère lui collait à la peau alors qu'il n'aspirait qu'à un peu de normalité, de banalité, juste ce qu'il faut de répit.
Pour lâcher prise … À trop vouloir tout contrôler, on finit par en devenir dépendant, aliéné dans une folie d'où on perd toute notion de rationalité et d'authenticité. Totalement hors de contrôle …

Posté derrière son comptoir allant de droite à gauche et de gauche à droite servir diverses consommations, échanger quelques mots par ci, par là, il revint sur sa gauche ayant en commande une vodka pomme par une charmante demoiselle. Il prépara rapidement sa boisson alors que le regard de la jeune femme se posait un peu partout dans la discothèque. Il lui déposa son verre sur une serviette, le plaçant face à elle, la détaillant discrètement du regard sans parvenir à croiser ses yeux.

– Vous êtes venue seule ce soir ?

Lui dit-il sur le ton de la conversation jamais dénuée de curiosité, espérant néanmoins capter son attention. Après tout, elle pouvait tout autant avoir donné rendez-vous à quelqu'un en ce lieu, c'était chose fréquente … Il n'avait toutefois pas envie de l'ennuyer plus que de raison.

Invité

Oui…

Je suis nouvelle dans cette ville.

Je ne me suis même pas présentée, moi c’est Sophia.

Invité

Jensen faisait toujours en sorte que tous ses clients soient satisfaits lorsqu'ils étaient servi par ses soins. Il portait à cela une grande importance comme toujours lorsqu'il travaillait et cela dans l'importe quel job qu'il faisait. Il ne pouvait dire s'il s'agissait là de perfectionnisme ou simplement d'une attirance pour les choses bien faites, mais il aimait le bon travail, et avait parfaitement conscience qu'à l'Outrageous, s'était une place en or qu'on lui avait offerte. Et rien que pour cela, il voulait se donner à fond pour que cela continue si positivement depuis qu'il se trouvait dans la ville. Parce qu'il ne s'était jamais trouvé aussi bien ailleurs qu'ici. Bien qu'il avait toujours le sentiment de vivre à l'étroit quoi qu'il fasse, partout où il allait, il voulait dépasser ce sentiment d'exiguïté. Ça lui prendrait un temps considérable, mais il ne baissait pas les bras, se faisant sa place à sa manière, avec acceptabilité et considération.

Ses yeux rivés sur la jeune femme qu'il n'arrivait à saisir, chose qui le contrariait, elle lui répondit, évasive, noyant son regard sur sa boisson. Lorsque soudainement, elle releva les yeux sur lui. Quelques secondes s'écoulèrent, la stoppant dans son discours qui semblait inachevé. Ce visage lui disait étrangement quelque chose, comme s'il l'avait déjà croisé par le passé. Peut être l'avait-il aperçu en ville, lors d'une soirée antérieure, ou encore ici à l'Outrageous. Mais toutes les hypothèses qu'il émettait lui apparaissaient dérisoires. Il savait qu'il faisait fausse route … il ne pouvait cependant pas se l'expliquer. Peut être lui faisait-elle tout simplement pensé à quelqu'un d'autre. Elle n'en restait pas moins très agréable à regarder. Un vrai plaisir pour les yeux. Il lui esquissa un demi-sourire avant qu'elle ne reprenne la parole toujours de sa voix cristalline lui signifiant qu'elle était nouvelle venue à Volusia. Il approuva ses mots d'un signe de la tête.

– Oh, je vois, c'est un bienvenue que je vous dois dans ce cas là. Lui dit-il, lui rendant son sourire. La jeune femme reprend alors la parole mais c'est à l'énonciation de son prénom qu'il reste interloqué l'espace d'un instant. Un prénom qu'il n'avait pas entendu depuis fort longtemps mais auquel il avait longtemps pensé. Que le passé se faisait soudainement si proche. Il n'y avait rien de plus irrationnel. Une coïncidence qui lui arrachait joie et douleur. Sophia … Répétant-il, subitement troublé. Retrouvant sa contenance ne voulant lui paraitre étrange, il enchaina retrouvant son sourire brusquement effacé captant à nouveau ses yeux. Enchanté Sophia, c'est un vrai plaisir de faire votre connaissance, appelez-moi Jensen.

Des rencontres il en faisait tous les jours, cependant, il y en avait qui marquaient plus que d'autres. Et la leur était de celle qu'il n'oublierait pas avec rapidité. Cette résonance en lui avait réveillé des réminiscences endormies ou qu'il avait voulu silencieuses, qu'il ne pouvait cependant plus chasser de son esprit à présent, déjà avait-il eu bien du mal à le faire … Un mélange complexe et inexpliqué de sentiments qui se bousculaient en lui sans raison. Bien que son passé ne l'avait pas une seule fois quitté, bien qu'il ne cessait d'y penser, jamais il n'avait vécu un tel écho dans une ville dont il était étranger il n'y a pas encore de cela quelques mois. Alors pourquoi maintenant ?

Invité

Merci, je sens que je vais aimer cette ville si tous les gens sont aussi accueillants.

Le plaisir est partagé.

Letham ?

Invité

Si dix ans en arrière on lui aurait dit qu'il allait retrouver Sophia en cette soirée, dans une telle situation, il aurait rit. Premièrement, à l'âge qu'il avait, il aurait été dans l'incapacité de se projeter dans le temps aussi loin dans un futur inenvisageable pour une raclure comme lui. Deuxièmement, les seules fois où il avait essayé de penser futur, s'était six pieds sous terre qu'il s'était vu, avec personne pour le pleurer, pas même quelques fleurs pour honorer ce nom, celui d'un inconnu, indigne de tant d'actes commis, de tant de paroles formulées jamais très agréables … et il en passait sur ses déboires d'adolescent. Oui, pour lui, le futur n'avait été qu'illusion floue inventée pour ceux qui naissent dans le prestige et la richesse, dont la seule question qui peuvent avoir à se poser n'est autre que l'embarras du choix d'un devenir qui aurait le devoir de n'être qu'honorable et envié par d'autres en dessous dont l'accès ce fait toujours refusé. Alors à quoi bon avoir des plans irréalisables ? Pour le simple fait de prétendre croire encore en l'espoir … Non merci. Il avait préférer passer son chemin allant à la mort en se marrant, indifférent de ce qui pourrait lui arriver.

Et à présent, il se retrouvait là, barman à L'Outrageous, un boulot honnête au salaire suffisant pour ses besoins, toujours moindres, et un parcours de vie qu'il avait renversé son existence à jamais, à présent, en quête de rédemption, bien que ses perspectives d'avenir restaient très limitées. Néanmoins, un tout autre homme désormais. Elle lui souriait et il n'en était que plus ravi de capter son attention, bien que ce ne soit que pour une soirée et de lui apporter un peu de sympathie surtout qu'il savait les débuts toujours difficiles. Il lui fit un haussement de sourcils ne pouvant dire s'il en était ainsi partout mais le lui souhaitant grandement. C'est lorsqu'il se présenta à elle qu'il sentit ce bouleversement qui l'avait lui aussi happé. Sa réaction n'était pas ce que l'on pouvait qualifier de prévisible. Elle baissa soudainement le regard sur son verre descendant quelques gorgées, rompant le contact visuel. Lorsque la jeune femme le regarda à nouveau, il surprit un léger changement … Comme s'il avait dit quelque chose qui l'aurait mis à l'aise. Elle lui répondit toutefois gentiment bien qu'il saisissait son malaise qui faisait tant écho en lui, incompréhensible.

Lorsqu'elle reprit la parole, et qu'il s'attendait à quelque chose dont on ne peut plus formel, elle le surprit d'une façon des plus inattendus. Il eut un temps d'arrêt, la regardant avec intensité, envahi de souvenirs du passé auxquels il avait durant tant d'années tenté d'enfermer dans un coin de son esprit pour ne jamais avoir à le rouvrir. Il ne pouvait y croire … Sophia Clarkson, ici à Volusia, C'était inestimable et à la fois surréaliste. Il avait eu besoin de la maintenir dans cette image du passé qu'elle avait tenu toutes ses années pour parvenir à la laisser derrière cette lourde porte, et voilà qu'il la trouvait ici, lui apparaissant si transformée, mais n'ayant en rien décrue en beauté. Elle avait un charme fou, elle en avait toujours joué avec expertise d'ailleurs … Et les années n'avaient fait que jouer en sa faveur …

– Clarkson … Il marqua un temps d'arrêt avant de reprendre interloqué. Wow … Ça fait un bail … Il se gratta la nuque, nerveux. Ben, ça à l'air d'aller de ton côté … Enchaina t-il tentant de pallier à sa difficulté. Le vouvoiement s'en était allé si aisément au moment même où elle avait prononcé son nom … Après tout, il pouvait s'estimer chanceux, elle ne l'avait pas totalement oublié en fin de compte lui qui avait longtemps pensé qu'il n'avait été rien de plus qu'une insignifiance au milieu de tant d'autres pour elle … Il ne pouvait pas dire que l'attachement avait trop été leur fort à l'époque. Elle avait toujours eu cette manie qui le foutait en l'air, lui faisant voir tout ses autres autour d'elle et lui, si proche, incapable de l'atteindre. Elle ne le voyait pas … Elle ne l'avait jamais vu … Et il se révoltait toujours contre elle pour une telle raison, mais prétextant toujours tant d'autres choses pour seulement qu'elle le remarque … En vain.

Invité

C’est vrai ça fait longtemps…

On peut dire ça, pour toi aussi ça à l’air d’aller

Ca fait longtemps que tu es dans cette ville ?

Invité

Le temps avait plutôt bien fait les choses. Auparavant, c'était de recul qu'ils auraient eu besoin mais qu'ils ne parvenaient à en prendre, trop impliqués. Elle avait sa vie sur laquelle elle avait toujours posé ce voile épais et lourd sur son passé et son histoire, qui empêchait à Jensen de savoir qui elle était réellement, l'obligeant à ne la voir que comme elle voulait qu'elle le voit. Un jeu d'apparences sur lequel ils étaient tout deux de très bons joueurs. Les seuls moments qu'il avait pu passer près d'elle, et où ils leur étaient arrivés de faire preuve de sincérité l'un envers l'autre, lui donnant l'impression d'une ressemblance diffuse entre eux, étaient les soirs où ils étaient soit trop saouls soit trop défoncés pour parvenir à se faire la guerre. Mais qu'il aimait ces soirées-là. Un sacré contraste quand il y repensait … Une toute autre vie à laquelle on ne pourrait croire quand on constatait à présent comme il était rangé et clean. Et pourtant, il avait été ce jeune là et elle aussi. Les remontrances et les jours de colle qu'il se prenait au foyer pour avoir passé la soirée dehors, à ne rentrer que tôt dans la matinée encore éméché et titubant. Parce qu'il avait toujours dit aux autres qu'il vivait dans un squat de la ville avec d'autres jeunes, mais ce n'était en rien vrai. Il avait bien des comptes à rendre et n'était pas aussi libre qu'il le prétendait. Cependant, ça ne l'avait en rien empêché de faire des conneries. Il n'avait menti que pour éviter de constater cette pitié dans le regard des autres ou alors des yeux envieux qu'il ne pourrait concevoir. Parce qu'il ne cherchait à être que comme il le voulait, réinventant sa vie à chaque parole, vivant dans une pseudo-réalité illusoire. Il échappait ainsi aux questions indiscrètes. Mais ils étaient tous des losers l'être un peu plus ou un peu moins, on ne fichait bien de la différence.

Néanmoins quand il avait rencontré Sophia, rien n'avait plus été pareil. Il avait cherché à la connaître, à se rapprocher d'elle, à se faire remarquer. Sans franc succès. Elle ne lui avait jamais laissé une telle opportunité et pourtant ils en avaient passé du temps ensemble. À chaque tentative, elle ne l'éloignait qu'un peu plus, le tenant à l'écart. Il n'avait jamais été en mesure de la comprendre … Elle ne lui avait jamais permis une telle chose. Personne ne pouvait s'en vanter de toute manière. Elle restait intouchable. Enfin pas physiquement … Sauf à lui peut être. Il avait finit par en conclure qu'ils n'étaient bons que pour le pire et le mauvais et s'était fait à cette idée. Puis était survenu ce coup, ce fameux soir sur lequel elle n'avait pas été … mais qui l'avait condamné lui. Ensuite le centre de redressement où il y avait passé quatre années de sa vie. Définitivement éloigné, coupé de son milieu, il ne s'était pas passé une seule journée sans qu'il ne pense à elle cependant … Mais à sa sortie, alors âgé de 21 ans, comment aurait-il pu savoir où elle se trouvait ? Surtout qu'il restait convaincu qu'elle avait vite du le chasser de son esprit. Alors il avait été temps pour lui d'arrêter les conneries et de faire autre chose de sa vie qu'une dramaturgie.

Elle vint alors lui répondre confirmant ses propos … C'était si spécial de la retrouver ici après tout ce temps qu'il ne savait ce qu'il devait en penser. Mais ils étaient des adultes aujourd'hui, un tel fait jouait en leur faveur et il ne pouvait être que productif. Un léger blanc s'installa subitement entre eux avant qu'elle ne vienne le briser, ne voulant laisser l'atmosphère leur peser pour des choses qui étaient survenues depuis si longtemps.

– Quelques mois et je m'étonnes encore …

Lui dit-il, un fin sourire sur les lèvres.

Et toi, qu'est-ce qui t'amène par ici ?

Il était plus que curieux de savoir ce qui l'avait conduit dans la petite ville de Volusia. Peut être pour les mêmes raisons que lui, cependant, sa décision n'était advenu que d'un pur hasard ne pensant pas qu'il s'éterniserait de la sorte dans la ville. À présent, il ne regrettait plus son choix …

Invité

Tu ne comptes pas rester ici ?

Moi…j’ai toujours voulu visiter la Floride. J’ai postuler dans plusieurs ville et il n’y a qu’ici que j’ai eu une réponse positive alors j’ai fais mes valises et me voila.

Invité

Ce léger malaise du à leur reconnaissance qui les avait survolé l'espace d'un instant se dissipait lentement. Tout deux avait conscience que le temps a passé maintenant et que le passé est bien mieux là où il est, derrière. Jensen réapprenait lentement à vivre dans le présent se défaisant peu à peu de son passé pour tenter d'aller de l'avant, mais il devait bien reconnaître que c'était un vrai combat et qu'il lui arrivait bien souvent de baisser les bras. Mais il était important pour lui de ne pas perdre un tel objectif de vue. C'était son ticket de sortie pour rêver d'une vie meilleure, plus stable et plus rangée que celle à laquelle il n'avait de cesse de prendre en référence. Laisser de côté un comportement réflexe pour s'obliger à agir différemment, à l'encontre parfois même de lui-même pour être en mesure de faire les bons choix. Se retenir de marteler la gueule d'un type et d'en recevoir à la pelle à l'énonciation d'une remarque qu'il n'apprécierait pas. De ne plus lâcher un taff sous prétexte qu'avec le boss ça ne clique pas. Trouver un autre moyen plus sain de décompresser au lieu de s'enfermer chez lui, la tête dans le gaz, dans l'attente d'un jour meilleur. De cesser de s'envoyer des filles pour pallier à sa solitude trop pesante. Tant de choses à changer, à améliorer tout au plus, de directions à prendre, de positionnements à tenir. Pas vraiment ce qu'il y a de plus simple quand il a passé tant d'années à raisonner de la sorte, pensant être dans le vrai. La liste était longue, il en avait parfaitement conscience, néanmoins, il ne jugeait pas cela infaisable. Il savait qu'il le pourrait. Il ne devait que s'en donner les moyens. La volonté et la motivation n'ont jamais été ce qu'ils manquaient chez Jensen. Il avait été volontaire pour ficher sa vie en l'air, il le serait tout autant pour la remettre sur pied. Il n'en avait toujours été que le seul maitre.

Ils essayèrent alors de conserver ce rapport formel et nouveau entre eux qui ne lui déplaisait pas, c'était toujours mieux que de parler souvenirs, toujours fâcheux. Il savait qu'elle avait pas mal dérouillé dans sa vie bien qu'elle n'en parlait jamais … Il n'avait pas été aveugle, mais il avait toujours respecté sa vie privée. Et le silence régnant en maitre entre eux, ça n'empêchait en rien la connaissance. S'il elle en a eu conscience ? Il ne pourrait le dire, toutefois il avait toujours pensé qu'elle préfèrerait bien mieux l'idée de le savoir ignorant que trop curieux, faisant des suppositions et des suppositions à son propos qu'elle ne voudrait justifier. Ça évitait bon nombre de questions dont ils n'avaient pas forcément envie de découdre. Et il ne s'en était jamais plaint.
Il semblait avoir attiré sous attention par sa formulation. Il lui sourit agréablement avant de lui répondre plus justement :

– Quand je suis arrivé ici, je ne comptais pas resté, j'avais déjà en tête la prochaine ville après celle-là. C'était un peu comme une escale pour moi. Mais finalement, on dirait bien que je suis encore là pour un bon bout de temps … Lui dit-il dans un petit rire. Il écouta avec intérêt l'argument qu'elle lui soutint pour appuyer sa venue ici. Alors tu ne va pas être déçue, tu vas te plaire ici, j'en suis certain. Commentant-il avec sincérité. Et tu as trouvé du taff ou ? Reprit-il sur le ton de la conversation.

Il jeta quelques coups d'œil autour du comptoir pour voir si des commandes n'étaient pas en attente ou si des habituées ne s'y présentaient pas. Peau de balle. Il ne travaillait ici que depuis trois ou quatre mois, mais il s'était déjà fait sa petite clientèle personnelle et il devait bien avouer que niveau pourboire, ça avait ses avantages.

Invité

T’étais parti pour faire le tour des Etats-Unis.

Et pourquoi tu t’es arrêté ici ?

Pour le moment la ville m’a l’air accueillante, je m’y sens bien. Je travail au Palacio dans le centre ville, ça nous fait au moins commun, on fait la même chose.

Je devrais peut être te laisser travailler, je ne voudrais que ton patron te tombe dessus par ma faute.

Invité

Ils ne pouvaient dire combien de temps il allait tenir de la sorte sans lui demander plus d'explications … Quand vraiment, elle aura reprit cette place privilégiée comme au bon vieux temps qui ne lui faisait cesser de penser à elle et d'enchainer les doutes les uns après les autres pour finir par ne plus savoir ce qui est vrai et ce qui ne l'est pas. Mais pour l'instant, et en ce lieu, il se suffisait de ce qu'ils étaient capables de faire. Ils marquaient une certaine distance entre eux qui n'étaient cependant pas trop franche pour empêcher de mener à bien une conversation. Chose qui pourtant n'avait jamais été leur fort. Ils passaient plutôt le clair de leur temps à s'engueuler à longueur de journées, à se balancer des vacheries qui ne faisaient que plus mal au lieu de se dire les choses telles qu'elles étaient parce inavouables. Au moins en cet instant, il pourrait croire au fait de parvenir à avoir un certain contrôle sur la situation et à maitriser plutôt bien leur échange. Néanmoins, ils se gardaient bien d'aborder la profondeur, préférant la surface, beaucoup plus lisse, limitant la casse. Toutefois, il pouvait être sur qu'à présent qu'elle était réapparut dans sa vie, il ne serait pas à l'abri d'une perturbation. C'était inévitable. Il n'avait jamais été en mesure de la nier, il ne le pourrait pas plus aujourd'hui.

Peut être s'étonnait-elle autant que lui qu'être retomber l'un sur l'autre après tant d'années, et peut être appréhendait-elle, elle aussi, les retombées de telles retrouvailles. Parce que bien que les années avaient passées, qu'ils avaient tous les deux muris, ce n'était pas pour autant qu'ils pouvaient prétendre que ce qu'ils avaient vécu ne pesait rien, n'avait pas d'importance, qu'on pouvait l'oublier en secouant assez fortement la tête. Ça avait compté pour lui, elle avait compté pour lui et continuer encore aujourd'hui. Inéluctablement attiré. Sophia lui montrait de l'intérêt et il mentirait s'il disait que ça ne lui plaisait pas … Il sourit à sa remarque, sachant qu'elle n'était pas dans le faux.

– Comment te dire … Comme dans les bons vieux westerns, on court à toutes blindes en direction de la frontière dans l'espoir de trouver une terre d'asile, dans mon cas, ça a été Volusia.

Lui dit-il haussant les sourcils. Elle lui expliqua ce qu'il en était pour elle, et il fut étonné qu'elle travaille elle aussi dans une boite de nuit. À croire que les circonstances jouaient pour eux.

Ouais, tu l'as dis… Je n'y est jamais mis les pieds, mais il paraît que la boite à bonne réputation…

C'était à la fois si troublant et si agréable … D'être en mesure de l'approcher lentement sans qu'elle ne le fuit ou le repousse. Il avait autant envie d'en profiter que de s'en méfier. Mais il savait que dans un tel rapport, il pourrait parvenir à entrer en contact avec elle. Parce que les questions demeuraient éternelles et qu'elles n'avaient toujours pas trouvé de réponses. Il surprit ses paroles lorsqu'il reposa le regard sur elle, venant de jeter un coup d'oeil à son bar.

– Non rassure toi, ça n'arrivera pas. Et puis, même si cela se produisait, j'ai une bonne excuse non ?

Lui dit-il la chambrant gentiment, flirtant légèrement avec elle. Chasser le naturel, il revient au galop …

Ne t'en fait pas, je termine dans deux heures de toute façon.

Relevant le regard sur la foule, il aperçut Lynn se diriger vers le bar. La regardant à nouveau, il lui dit, posément :

Excuse-moi Sophia, j'en est pour deux minutes, je reviens tout de suite.

La gratifiant d'un sourire, il se retourna pour préparer une vodka martini. Frappant la vodka et le martini, il en versa le contenu dans un verre ajoutant un zeste de vodka qu'il orna d'une olive et d'une fine rondelle de citron. Disposant la consommation à quelques chaises de Sophia, il accueillit Lynn qui le remercia, échangeant quelques mots avec elle, lui précisant une nouvelle fois qu'il ne faisait pas le tarif de nuit. Il glissa ensuite le pourboire dans une poche de son jean. Prenant ensuite congé d'elle, il revient vers Sophia, un petit sourire sur les lèvres.

– Tu vas connaître cela toi aussi très bientôt …

Lui dit-il sur le ton de la plaisanterie, s'accoudant à nouveau au bar.

Invité

Je vois, je vois. Du coup tu as du en visiter des villes cow-boy.

Bah écoute pour le moment, j’ai fait une semaine avec eux et oui ça à l’air pas mal, en tout cas l’ambiance dans l’équipe est bonne c’est le principal. Après je ne connais pas vraiment les clients.

Oui peut être, mais pour ton patron ce n’est peut être pas une excuse valable.

Ah oui, faignant.

Et après tu as quelque chose de prévus ?

Oui oui vas y

Oui très certainement, c’est une bonne cliente ?

Invité

Leur conversation se passait sans à-coups ni brusqueries. Autrefois, ils en auraient été incapable. Ce qui avait changé ? Peut être tous les deux. La vie avait du se charger de l'évolution qu'ils avaient connu séparé l'un de l'autre. Au final, cet éloignement leur a peut être rendu service. Jen' restait convaincu que s'ils avaient continué à se voir régulièrement ils auraient été incapable d'une telle prise de recul sur eux, sur eux deux. Ou alors auraient-ils connu un rapprochement des plus énigmatiques dans lequel il aurait fini par se perdre. Parce que oui, le temps a passé, cependant, il n'était pas encore en mesure de dire où elle en était réellement, et ce qu'elle entendait par changement sur son compte. Peut être ne le savait-elle pas elle-même … Peut être faisait-elle comme lui « nouvelle vie, nouvelle ville ». Peut être bossait-elle encore elle aussi sur son code personnel auquel elle tentait de s'y tenir. Tout ce qu'il pouvait faire n'était que des suppositions sur son compte dans l'attente qu'elle les infirme ou les confirme. Mais ce qu'il voulait savoir été, si elle avait définitivement mis ses écarts de conduite au placard ou si elle tentait encore de s'en détacher.

Tout était de l'ordre de sa vie privée et lui demander cela en plein milieu de la conversation provoquerait un froid qu'il n'arrivait plus à dissiper par la suite. Il le savait … Jamais elle ne lui avait parlé de cela par le passé – encore fallait-il qu'elle le reconnaisse – alors pour quelques raisons le ferait-elle aujourd'hui ? Elle ne lui devait absolument rien … Et il avait nullement envie de gâcher un si beau départ par ses questions incessantes qui étaient des plus indiscrètes. Mais la voir ici, dans une boite de nuit, seule qui plus es … Oui, il ne pouvait s'empêcher d'y penser. Néanmoins, là n'était pas l'essentiel, il l'avait retrouvé, et il n'en était que plus ravi.
Il sourit sur la formulation de sa phrase alors qu'elle était tant dans le vrai.

– On peut dire ça, ouais … Lui dit-il en souriant alors qu'elle lui parlait de ses débuts au Palacio. Ouais tu l'a dit, si l'ambiance est là et si tu arrives à t'intégrer facilement, c'est un bon début.

Il la sentit légèrement gênée par sa remarque mais elle ne se remonta pas lui répondant avec expertise. Oui ce n'est pas faux, mais ça ne veut pas dire que j'ai tort. Lui dit-il en plaisantant. Souriant à ses propos, il lui répondit prenant un air faussement concentré. Non, rien de prévu pour la fin de soirée … si ça te dis on se retrouver dès que j'ai terminé ? Enfin sans obligation … Tu as surement mieux à faire surtout si c'est ton jour de repos. Lui glissa t-il dans un sourire. Étant donné qu'il ne connaissait pas les plans de la jeune femme, il ne souhaitait pas s'imposer. Peut être qu'elle préfèrerait conserver une certaine distance entre elle et lui qu'il comprendrait …
Il dut ensuite s'absenter pour aller servir une consommation à une cliente régulière de l'Outrageous qu'il avait vite repéré. Lorsqu'il revint vers elle, la jeune femme regardait vers la foule, ses yeux se perdant dans la populace qui s'amassait sur la piste de danse. Elle répondit néanmoins à sa certitude avec affirmation. Ils arrivaient même à être d'accord sur un banal sujet de conversation. Oui, ils étaient en progrès, il en était convaincu.

– On peut dire ça, elle vient tous les samedis et les soirs de déprime qu'elle appelle. Moi je me plains pas, j'en profite même, mais quand tu commences à avoir une vie comme la sienne, ça sent pas bon. Lui dit-il sur un ton plus bas pour ne pas paraître impoli si leur conversation venait à être surprise par des oreilles mal avisées. Les mots voyagent, il avait pu constater cela depuis qu'il travaillait ici. Tout finissait par se savoir et cela sur tout le monde et si alors c'était trop bien caché c'était la rumeur que les gens étendaient, se pavanant d'histoires en histoires toutes aussi farfelues les unes que les autres … Et encore plus depuis que la ville connaissait la paix … Rien n'arrête les couleuvres. Il avait beau ne pas les colporter, parfois même faisait son possible pour les démentir … Le jour d'après, elles ne revenaient que plus virulentes encore. Le plus judicieux était d'y tourner le dos et de ne surtout pas s'enflammer.